Un serpent dans la main, vraiment ?

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Homélie pour la solennité de l’Ascension, année B

Actes 1,1-11 / Psaume 46 / Ephésiens 4, 1-13 / Marc 16, 15-20

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

Chers Amis,

Avez-vous déjà pris un serpent dans la main, vous ? Oh non, ne faites pas ça ! C’est dangereux, c’est réservé à des professionnels !

Est-ce que vous avez déjà expulsé un démon ? Non ! C’est dangereux de travailler avec les forces du mal, ça aussi c’est réservé aux professionnels.

Est-ce que vous avez déjà parlé chinois ? …un peu ? On a déjà bien de la peine avec l’allemand, dans notre pays, on ne va pas en rajouter !

Est-ce que vous avez déjà bu un poison mortel ? Eh bien non, vous ne seriez pas là pour en parler, forcément !

Pourtant, chers Amis… vous êtes croyants, n’est-ce pas ? Sinon vous ne seriez pas là ce soir ! Alors je vous redis ce que vous venez d’entendre, il y a quelques instants, dans l’Evangile :

« Voici les signes qui accompagneront

ceux qui sont croyants – VOUS ! – :
en mon nom, ils expulseront les démons ;
ils parleront en langues nouvelles ;
ils prendront des serpents dans leurs mains
et, s’ils boivent un poison mortel,
il ne leur fera pas de mal… »

Alors quoi ? Vous n’êtes pas croyants ? C’est pourtant de nous dont Jésus parle dans ce texte ! Jésus serait-il devenu complètement fou, pour affirmer que ces signes accompagneront ceux qui croient en lui ? Evidemment que non, il n’est pas fou, c’est Jésus !

Mais il ne faut pas oublier la toute première partie de sa phrase : « Voici les SIGNES qui accompagneront ceux qui sont croyants »… Les SIGNES, c’est-à-dire les SYMBOLES.

Le danger avec la Bible, comme avec n’importe quel texte sacré, c’est de le prendre au pied de la lettre. On ne prend jamais un symbole au pied de la lettre, chers Amis !

Si je veux dire à ma Maman, dimanche, que je l’aime de tout mon cœur, parce que c’est la fête des mères, je ne vais pas m’ouvrir la poitrine, sortir mon cœur et le lui offrir, tout de même ! C’est symbolique : je vais lui offrir des fleurs qui diront mon amour.

Paul, dans la deuxième lecture de ce jour, nous explique très bien que l’Ascension peut également être vue comme un symbole.

Paul nous disait « Qu’est-ce que veut dire : ‘Il est monté’ ? » Et il répondait « Cela veut d’abord dire qu’il était descendu ! » … ah oui, ça c’est assez logique !

« …descendu dans les régions inférieures » – qu’est-ce que ça signifie symboliquement, ça ? Les régions inférieures de nos âmes, de nos cœurs, les régions où il fait nuit, les régions qui avaient besoin de sa lumière, c’est là d’abord que Jésus est descendu.

Reprenons alors ces paroles qui nous semblaient étranges il y a quelques minutes, et voyons-les  comme des signes ou des symboles, vous allez voir, ça change tout…

Et vous allez vous rendre compte que, tout cela, vous l’avez déjà fait, en réalité !

• ils expulseront des démons…

Vous croyez ne l’avoir jamais fait ? Mais bien sûr que si, chers Amis ! Sans être exorcistes pour autant ! Chasser le mauvais esprit, ça vous arrive tous les jours : un ami a du chagrin, et vous êtes là pour qu’il pleure sur votre épaule, vous trouvez les mots pour le consoler au téléphone et même pour le faire rire ! Eh bien voilà : vous avez chassé le mauvais esprit qui était dans son âme…

• ils parleront en langues nouvelles…

Pas besoin de parler chinois pour cela – d’ailleurs ce n’est pas une langue nouvelle, le chinois ! Est-ce qu’il y a des amoureux parmi vous ?… Dénoncez-vous… Ah je pourrais lever la main aussi, hein ! Nous, les religieux, nous avons simplement été un peu plus impatients que vous, nous avons voulu profiter des noces éternelles tout de suite, ici-bas, mais nous sommes amoureux !

Mais… vous avez déjà entendu les amoureux se parler ? Ils se donnent des noms qui n’existent pas : Chouchou, Loulou, mon lapin en sucre, ma bichette d’amour… ils ont leur langage à eux ! Et c’est une langue nouvelle, c’est la langue du cœur. C’est cela, parler en langues nouvelles…

• ils prendront des serpents dans leurs mains, disait Jésus…

Ah là, on a envie de dire : « quand même, ça, moi je ne l’ai jamais fait ! »

Dans la langue de Jésus, en hébreu, « serpent » ça se dit « SaRaPH », ça vous fait une belle jambe… mais « SaRaPH », ça veut dire « le brûlant ». L’hébreu, c’est une langue qui parle par images… et c’est vrai que, si l’on est mordu par un serpent, ça brûle !

Le brûlant… alors quoi ? Ça ne vous est jamais arrivé d’avoir quelqu’un de malade à la maison, votre époux, votre épouse, votre enfant ? De lui apporter au lit une tasse bien chaude en lui disant : « Attention, c’est brûlant ! Mais bois, ça va te faire du bien… »

Et vous avez pris dans votre main ce « brûlant » pour soigner quelqu’un d’autre… Au passage, chers Amis, le serpent, c’est le symbole de toutes nos pharmacies… et ça vient de la Bible !

• s’ils boivent un poison mortel, il ne leur fera pas de mal, disait encore Jésus…

C’est un peu plus complexe à comprendre, mais… boire un poison mortel, c’est par exemple entendre des paroles qui tuent. Il y a des paroles qui tuent, vous savez ! Et non seulement il nous arrive d’en entendre, mais… il nous arrive aussi parfois d’en dire, soyons honnêtes.

Eh bien la vie selon l’Esprit de Dieu c’est de parvenir à recevoir des paroles qui blessent et à se dire que cette personne qui vient de nous blesser est aimée de Dieu autant que nous, de demander à Dieu de lui pardonner et de nous aider à pardonner aussi, un jour.

C’est l’amour de Dieu qui agit en nous, quand on y arrive ! Et alors le poison de ces paroles-là est incapable de nous faire du mal.

Enfin Jésus dit :

• ils imposeront les mains aux malades et les malades s’en trouveront bien…

Mais bien sûr que ça vous est aussi arrivé. Pas besoin d’avoir le secret pour ça, pas besoin de pratiquer le sacrement des malades comme moi-même à l’hôpital, non ! Un ami pleure la mort d’un proche et vous venez lui mettre la main sur l’épaule pour le consoler, lui dire : « Je suis là ! Je suis avec toi ! »… Mais c’est imposer la main, ça ! Bien sûr ! Et votre ami ira un peu mieux grâce à cette main que vous lui avez imposée sur son épaule.

Vous voyez, Chers Amis, vous avez fait tous ces gestes !

C’est tout simple de suivre Jésus en signes. Ça passe par de petits gestes du quotidien. Pas besoin de prendre une vipère dans notre main, c’est symbolique. Pas besoin de monter au Ciel pour le suivre Jésus à l’Ascension, c’est symbolique.

Répandre l’amour de Dieu sur toute la terre, c’est à coup de petits signes qu’on le fait. Parce qu’on aime Dieu.

Et ça, c’était dans la première lecture, le livre des Actes des Apôtres, qui commençait, vous l’avez entendu, par « Cher Théophile… » On a cherché pendant des siècles qui était ce mystérieux Théophile… et puis un jour on a compris : Luc a écrit les Actes en grec… et « Théophile », en grec, cela veut dire « Celui qui aime Dieu ». Le Livre des Actes s’adresse à toute personne qui aime Dieu, à vous aussi ! …pas à un mystérieux Théophile !

Alors vous voyez, Chers Amis, la Bible doit être lue aussi pour ce qu’elle nous révèle en symboles… – c’est d’ailleurs un Saint qu’on oublie toujours de prier à la Toussaint, Saint Bole… on devrait ! – elle ne doit jamais prise au pied de la lettre. Il en va de même pour la fête d’aujourd’hui, l’Ascension.

Du coup, je vous souhaite encore une très belle Ascension, sans pour autant MONTER sur vos grands chevaux parce que tout ne doit pas toujours être pris symboliquement quand même !

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Le Pâquier, jeudi 9 mai 2024, 9 h.

Roche (VD), jeudi 9 mai 2024, 19 h.