Notre première maison

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Homélie pour le 4e dimanche de l’Avent B

2Samuel 7,1-16  /  Psaume 88  /  Romains 16,25-27 / Luc 1,26-38

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

Chers Amis

Vous avez vu comme elle est belle, cette crèche de notre paroisse ? Magnifique, hein ? Ah ça, les personnes qui s’occupent de décorer nos lieux de culte font un travail remarquable, chaque année !

Qu’elles en soient remerciées !

Mais je peux dire cela de chacune et chacun de vous ! Je suis sûr que, chez vous, c’est tout aussi magnifiquement décoré pour le temps de l’Avent, pour le temps de Noël… Il y a des crèches tout à fait incroyables !

Et puis il suffit de regarder nos rues. Nos rues sont magnifiquement décorées à cette période de l’année ! Nos communes font un travail remarquable, elles aussi : ça clignote de partout, il y a des petites lumières dans tous les sens… ça sent Noël, n’est-ce pas ?

Pourtant, voyez-vous, en décorant nos maisons, en prenant soin de nos crèches, en prenant soin de nos rues, de nos avenues au moment de Noël – et c’est très juste de le faire ! – en dépensant pour cela un peu d’argent pour le plus grand bonheur des fabricants de guirlandes lumineuses… eh bien en faisant tout cela on tombe chaque année dans le même piège…

Ce piège dans lequel est tombé le roi David jadis, et qui nous était relaté dans la première lecture il y a quelques instants.

Si vous lisez ce deuxième livre de Samuel – dont nous avons eu un extrait – si vous le lisez dans vos Bibles, en allant un tout petit peu plus loin que l’extrait qu’on a entendu ce matin, c’est même assez comique, au-delà du passage que nous avions aujourd’hui.

C’est assez comique parce que le roi David, vous l’avez entendu, se construit un palais. Bon, chacun ses droits, hein ! Et pour un roi c’est assez légitime, finalement, de vivre dans un palais.

Encore que le pape François, vous le savez, ne vit précisément pas dans le Palais Apostolique au Vatican, il a gardé son petit appartement tout simple à la maison Sainte Marthe. Deux pièces.

Mais enfin, à l’époque des rois c’était assez légitime, pour un roi, de se construire un palais. Et il s’agit d’un palais assez exceptionnel : on nous le décrit de long en large dans ce livre de Samuel.

Et ce n’est qu’une fois ce palais construit que David se souvient tout à coup que l’Arche d’Alliance – c’est à dire Dieu lui-même – habite toujours dehors, devant chez lui, sous la tente ! Et qu’il fallait peut-être penser à lui faire, à lui aussi, une demeure digne ! Fallait peut-être même y penser D’ABORD, en fait…

Non. Lui, il s’est construit un palais pour lui… et puis Dieu, on verra plus tard !

Alors ce n’est pas ce que vous avez fait chez vous puisque vous avez construit une crèche. Vous avez pensé à Dieu. Et c’est bien. C’est très bien. Je vous félicite.

Mais ce matin, nous sommes invités à aller un tout petit peu plus loin. Parce que Dieu répond à David, par l’intermédiaire d’un prophète, comme toujours, le prophète Nathan.

Et il fait dire à David « Est-ce que c’est vraiment toi qui va me construire une maison ? Non. Le Seigneur te bâtira lui-même une maison ! » dit Dieu à David. Vous l’avez entendu.

Qu’est-ce que ça signifie ?

Il fait cette promesse incroyable à David : il lui dit : « c’est moi qui t’ai choisi,  je vais rendre ton peuple inoubliable, ton nom sera connu dans les éternités, ta descendance sera innombrable… et c’est moi qui vais te construire une maison ! »

C’est une formidable ironie ! David vient de se bâtir un palais exceptionnel… et le Seigneur dit : « C’est moi qui vais te le construire ! »

Parce que la maison… ça peut être beaucoup de choses, ça peut être une maison en dur, ça peut être une crèche…

Mais en hébreu, c’est le mot aussi qu’on utilise pour dire la famille, la maison.

Et c’est précisément ce que Dieu va faire pour David. Il lui construit une famille, une descendance innombrable. Quand le Seigneur fait dire à David qu’il lui bâtira lui-même une maison, c’est certainement à sa famille qu’il pense.

Et vous le savez, Jésus est descendant de David.

Quand le Seigneur dit : « Je te bâtirai moi-même une maison », il sait que tout au bas de cet arbre généalogique, il y aura Jésus, un beau jour.

Le psaume renforçait cette idée. Vous l’avez entendu : « Je l’ai juré à David, disait le psalmiste, j’établirai ta dynastie pour toujours ! » Voilà un autre mot pour « famille » et pour « maison » : dynastie. Jésus est né de Marie selon la chair, nous le savons bien, mais il est inscrit dans la maison de David. Dans sa dynastie. Des siècles après David va naître celui qui vient de sa propre maison et cette maison, c’est bien Dieu qu’il l’a bâtie au roi David.

Enfin, il y a un troisième type de maison auquel on ne pense pas toujours, et pourtant nous la connaissons tous, cette maison-là ! C’est notre première maison, à vous comme à moi…

Quelle est notre première maison ? Mais c’est le ventre de notre maman, bien sûr. Nous l’avons tous en commun, cette maison. Notre toute première maison, c’était le ventre d’une femme.

Évidemment, le roi David n’avait pas du tout pensé à cela lorsqu’il construisait son palais. Une descendance éternelle, il pouvait même se demander comment ce serait possible !

Et c’est précisément la question que pose Marie à l’ange : « Comment cela va-t-il se faire ? »

Ce qui pour David était un mystère impossible à comprendre, ce qui avait été repris dans les psaumes, annoncé depuis des siècles, ce mystère dont nous parlait Paul, aussi, dans la deuxième lecture, ce mystère dont nous ne devons jamais être blasés, ce mystère de Noël, Dieu qui se fait l’un de nous, ce mystère qui est maintenant révélé, disait Paul… c’est évidemment cette maison que Dieu a bâtie pour son fils : le ventre d’une maman.

Vous pouvez chercher dans toutes les autres religions, ça n’existe pas. Cette unique dans l’histoire des religions ! Dieu se fait l’un de nous, jusqu’à commencer par habiter le ventre d’une maman…

Alors je me dis… c’est bien d’avoir décoré nos maisons, c’est bien d’avoir fait des crèches. C’est bien d’avoir décoré nos rues. C’est beau tout cela ! Et si nous décorions nos mamans, au moment de Noël, qu’est-ce que ça donnerait ? Parce que c’est notre première maison !

Si elle est encore en vie, voilà une bonne occasion de la couvrir de lumière, de lui offrir des fleurs, de prendre soin d’elle pour honorer notre première maison… Et puis, si nous ne l’avons plus auprès de nous, ça serait une sacrée bonne idée d’aller mettre un peu de lumière sur sa tombe. Il y a pas qu’à la Toussaint qu’on visite les cimetières ! Et Noël, même si ça nous paraît peut être saugrenu, c’est précisément le bon moment d’aller honorer notre maman.

D’autant plus que, vous le savez, c’est un commandement, ce n’est pas une suggestion : « Honore ton père et ta mère ! »

Alors pensons aussi à nos mamans, à notre première maison sur cette terre en ce temps de Noël qui arrive.

Et puis enfin, je me dis qu’on peut aussi mettre des guirlandes dans nos cœurs parce que ça ferait pas de mal d’y mettre aussi de petites lumières. Parce que la crèche des crèches, finalement, elle est là !

C’est là que Jésus va venir ce soir, avant de venir habiter dans nos crèches en dur, bien décorées. C’est d’abord dans nos cœurs qu’il cherche asile, qu’il frappe…

A nous de lui faire une place et donc de la décorer juste avant qu’il n’arrive !

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Montreux, dimanche 24 décembre 2023, 11.00