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Homélie pour la fête de la Présentation du Seigneur
Malachie 3,1-4 / Psaume 23(24) / Hébreux 2,14-18 / Luc 2,22-40
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
Dans mon travail d’aumônier d’hôpital, il m’arrive d’avoir le bonheur de bénir un nouveau-né.
Je ne parle pas d’un nez arrangé par la chirurgie esthétique. Je parle d’un bébé, bien sûr, un bébé nouveau-né !
Et à chaque fois qu’il m’est donné d’entrer dans la salle d’accouchement, il y a quelque chose qui flotte dans l’air, il y a du sacré. Il y a un mystère en ce lieu… et je vais vous choquer quelques secondes : il y a de l’impureté dans ce lieu.
Ça vous choque j’espère ? J’espère, parce que dans notre esprit, nous prenons le mot impureté tel qu’on l’entend aujourd’hui. C’est à dire quelque chose de négatif, de sale.
Alors que dans la Bible ça ne veut pas, mais alors pas du tout dire cela. Au contraire, c’est positif la plupart du temps, l’impureté dans la Bible. Plus exactement, ça signifie une force mystérieuse, divine, très souvent liée à la vie et qui nous impose le respect, la distance.
C’est exactement le sens de la fête d’aujourd’hui et on l’a complètement oublié. La présentation de Jésus au temple, la présentation d’un bébé au temple, c’est la purification de sa mère. C’est ça qu’est venue faire Marie ce jour-là au temple.
Et alors là, vous devriez réagir aussi : « Enfin, comment ?? Marie, la toute pure, n’a pas besoin d’être purifiée ! »
Si. C’est exactement ce qu’elle est venue faire au temple, c’est le rite qui lui est demandé dans la loi juive de l’époque. 40 jours après la naissance de son enfant, si c’est un garçon… 25 décembre +40 : nous sommes bien au 2 février.
Si c’est une fille, la mère reste impure 77 jours. …et là je vous entends de nouveau : « Voilà bien la religion ! Masochiste ! La femme reste impure deux fois plus longtemps si elle accouche d’une fille, bah bravo ! »
Oui, sauf que c’est l’exact contraire de ce que vous pensez : elle est respectable deux fois plus longtemps, c’est pas du tout négatif !
Parce que je vous rappelle que, dans la conception juive, dans la conception biblique, une femme est également impure quelques jours chaque mois lorsqu’elle a ses règles. Et là aussi on devrait dire : « Bah voilà, c’est de nouveau misogyne ! C’est pas juste ! » Non, attention : impure signifie respectable, remplie d’une force divine de vie qui est mystérieuse.
C’est pas du tout sale, c’est pas du tout honteux, c’est pas du tout négatif !
Si les maris de ces femmes-là ne peuvent pas les toucher pendant quelques jours et après l’accouchement pendant 40 ou 77 jours, c’est parce qu’elles contiennent une force divine de vie sacrée qui impose le respect… et donc une certaine distance.
Vous voyez, Mesdames, que c’est tout autre chose que ce que l’on pourrait penser au départ.
Et alors évidemment : pourquoi, lorsqu’elle accouche d’une fille, c’est deux fois plus long ? Et bien parce qu’elle a donné naissance à un être qui lui-même va porter cette force de vie, donc elle est respectable deux fois plus longtemps. Ah, ça change tout, évidemment !
Et vous retrouvez ça jusqu’à la table de l’Eucharistie… vous ne me croyez pas ? Je vais vous montrer.
[il va chercher le purificatoire sur le calice]Vous savez comment ça s’appelle ça ? Il y a des anciens servants de messe parmi vous ? Ah-ah, « ça dépend où il est placé » ! C’est celui qui sert au calice, et il s’appelle le PURIFICATOIRE parce qu’il sert à PURIFIER le calice lorsqu’il a contenu le sang du Christ.
Et là, normalement, vous devriez à nouveau sauter en l’air : « Alors ça veut dire que le calice qui contient le sang du Christ est impur ? » Oui. Impur au sens biblique : il contient une force sacrée de vie divine. Et c’est pour ça que, pour le rendre à son usage normal, on le purifie.
Ça ne signifie pas du tout qu’on le rend propre : purifier, dans le langage biblique, ça signifie rendre au monde.
Tant qu’il est impur, seul le prêtre peut l’approcher. À partir du moment où il est purifié, tout le monde peut le toucher, le ranger dans l’armoire, pas de problème.
Et c’est la même chose pour une femme qui vient d’accoucher : tant qu’elle a cette force en elle – qui comme par hasard est du sang, exactement comme dans le calice – tant qu’elle a cette force divine de vie en elle, on ne l’approche qu’avec un infini respect. Tout le monde ne peut pas l’approcher. Et elle vient au temple se faire purifier – ça veut pas dire se faire nettoyer, quelle horreur ! – se faire purifier, c’est à dire être rendue à la vie normale après ce temps où elle est infiniment respectable.
Vous voyez, Chers Amis, Dieu a voulu que les hommes soient de chair et de sang, comme le disait la lettre aux Hébreux, notre deuxième lecture, nous sommes faits de cela.
Et Malachie, le prophète que nous lisions en première lecture, parlait lui aussi du pur et de l’impur en comparant tout cela, comme par hasard, à une force qui nous dépasse.
En ce dimanche, vous le savez, nous fêtons aussi l’apostolat des laïcs, c’est à dire votre fête à tous. Et nous fêtons aussi la vie consacrée, ces hommes et ces femmes qui se sont donnés corps et âme à leur Dieu.
J’aimerais tellement qu’en cette occasion, Mesdames, vous redécouvriez à quel point tant d’éléments de nos Bibles sont profondément féministes, en réalité. À quel point vous êtes infiniment respectables – plus que nous, Messieurs – dans l’idéal de notre Créateur.
C’est la bêtise des êtres humains qui change le sens des mots au point d’en pervertir la beauté. C’est la bêtise humaine qui a fait du mot impur quelque chose de sale. Mais au départ, c’est simplement le respect.
Vous voyez, si j’avais eu la chance d’avoir des enfants et si Dieu m’avait fait la grâce d’une fille, je l’aurais appelé Zoé, ça signifie en grec la vie. Et je lui aurais expliqué, aux jours de son adolescence, que ce n’est pas honteux, ce sang qui coule. Que ce n’est pas sale. Au contraire : que ça la rend infiniment plus respectable que tous les autres à ce moment-là, parce qu’elle porte en elle une force qui donne la vie.
C’est cela qu’il faut réexpliquer à nos jeunes filles.
Alors, Chers Amis, n’oublions pas tout cela. Respectons nous les uns les autres.
Respectons cette force de vie lorsque nous la rencontrons !
Et s’il vous est donné, comme moi, d’entrer dans la chambre d’un nouveau-né ou dans une salle d’accouchement… souvenez-vous que ce lieu est impur au plus beau, au plus noble sens du terme et entrez-y donc avec le respect infini qui est dû à l’impureté, au sens biblique du terme.
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Les Diablerets, samedi 1er février 2025, 17.00
Aigle, dimanche 2 février 2025, 10.00
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