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Homélie pour le 28e dimanche TO, année B
Sagesse 7,7-11 / Psaume 89 / Hébreux 4,12-13 / Marc 10,17-30
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
Je ne sais pas si vous visualisez bien ce qu’est la vie d’un prêtre aujourd’hui… y a du travail !
Et encore cette semaine, en me couchant au soir d’une journée particulièrement bien remplie, je me suis entendu dire : « Seigneur, donne-moi le repos. J’ai FAIT ce que je devais FAIRE aujourd’hui, bien sûr je n’ai pas FAIT exactement ou parfaitement ce que j’avais à FAIRE, mais une chose est sûre, Seigneur, j’ai FAIT du mieux que j’ai pu. Et j’en avais, des choses à FAIRE. Eh bien je les ai toutes FAITES, du mieux que je le pouvais ! »
C’est exactement ce que dit le jeune homme riche à Jésus dans notre Evangile : « Tout cela, je l’ai FAIT », il a coché toutes les cases de sa To-Do List, comme on dit aujourd’hui. Il a tout FAIT.
Et si, ce soir-là, au lieu de m’endormir directement, j’avais pu veiller encore quelques minutes, je gage que j’aurais entendu la voix de Jésus me dire, comme au jeune homme riche : « C’est bien… une seule chose te manque… »
Et là, je me serais sûrement fâché, avant même d’entendre la suite ! J’aurais dit quelque chose comme : « Oui… tu vas encore me dire que j’aurais pu prendre plus de temps avec cette personne, que j’aurais pu répondre à cette lettre qui attend sur mon bureau, que j’aurais dû FAIRE encore cette visite, ou FAIRE encore ce mail… je savais que tu allais me parler de cela. Mais Seigneur j’ai FAIT du MIEUX que j’ai PU, je t’assure !! »
Cela vous arrive-t-il aussi de dire à Dieu que vous avez FAIT de votre mieux ? Je vois des têtes qui hochent… Nous sommes plein de bonne Foi en disant cela. Nous avons FAIT de notre mieux.
Et le jeune homme riche, lorsqu’il présente à Jésus la liste de tout ce qu’il a déjà FAIT, est plein de bonne Foi. Sûrement qu’il se dit : « J’ai FAIT du mieux que j’ai pu. »
Mais Jésus dit « Une seule chose te manque… » Alors quoi ? Qu’est-ce qui manque, Seigneur ?
Ce n’est pas toujours simple de comprendre cette parabole du jeune homme riche. Et on peut même la rendre très culpabilisante.
Mais pour bien la comprendre, je crois, il faut la laisser entrer en résonnance avec les autres textes que nous avons entendus ce matin.
C’est bien pour cela qu’il y a plusieurs textes, à la messe. C’est parce qu’ils sont ordonnés les uns aux autres, ils ont quelque chose à nous dire si on en cherche le fil rouge…
Vous sentez peut-être que depuis quelques minutes j’insiste lourdement sur le verbe « faire« … Je l’ai dit SEIZE fois en deux minutes. Ça fait un peu beaucoup…
Et c’est précisément là que se trouve l’écueil. Avec Dieu, il n’est pas question d’abord de faire. Ou plutôt, il est d’abord question de laisser-faire.
« Tu as fait tout cela ? dit Dieu… Fantastique ! …Et moi, est-ce que tu m’as laissé faire quelque chose, dans ta journée ? …Est-ce que tu m’as laissé une place dans ton agenda compliqué ? …Est-ce que tu m’as laissé un créneau pour que MOI je puisse faire quelque chose à travers toi ? »
1ère lecture : « J’ai prié, nous disait le texte, et l’intelligence m’a été donnée. J’ai supplié, et l’esprit de la Sagesse est venu en moi. »
…
L’Esprit de la Sagesse est venu en moi.
Ecoutez les verbes de la première lecture : « j’ai prié… la Sagesse est venue… je l’ai préférée. je ne l’ai pas comparée… je l’ai aimée… je l’ai choisie… et tous les biens me sont venus avec elle. »
Vous n’y trouvez pas le verbe « faire ».
Le jeune homme riche est riche… mais il est riche de biens qu’il a lui-même accumulés. Tandis que là, on parle de prier pour que d’autres biens nous viennent… des biens spirituels, l’Esprit de la sagesse, par exemple, pour qu’on puisse le laisser agir en nous, ensuite… c’est autre chose !
Dans la première lecture tout est à l’initiative de l’Homme, mais pas dans le faire.
Il s’agit de verbes qui montrent d’abord un état d’esprit : prier, aimer, ne pas comparer, choisir dans son coeur…
Combien de fois, dans ma journée, ai-je prié, aimé, choisi Dieu ? C’est une question que l’on peut se poser au soir d’une journée.
Ce n’est qu’après, dans le psaume, que les verbes sont, cette fois-ci, de l’ordre du faire. Mais le sujet n’est pas nous, c’est Dieu : « mets en nous, apprends-nous, rassasie-nous… FAIS-nous connaître… » C’est LUI qui FAIT…
Puis vient l’Evangile.
Nous, nous avons entendu la deuxième lecture avant l’Evangile mais vous savez que, chronologiquement, il faudrait les inverser. La première lecture vient de l’Ancien Testament, des textes que Jésus connaissait. Les psaumes, Jésus les chantait. Ensuite vient la vie de Jésus, l’Evangile. Et la deuxième lecture, c’est ce qu’en ont fait les premiers Chrétiens, elle devrait venir ensuite.
Prenons donc l’Evangile d’abord, dans l’ordre.
Le jeune homme riche a FAIT beaucoup de choses. Et Jésus commence par le féliciter, vous le remarquez. Mais il lui manque une chose. Et Jésus lui dit : « Va, sépare-toi de ce que tu as fait, ce n’est pas ça l’important. Puis ensuite reviens et suis-moi. C’est Dieu, désormais, qui va faire du neuf dans ta vie… »
Et le jeune homme – nous connaissons et nous avons réentendu la suite – s’en va tout triste. Rien ne nous dit, d’ailleurs, qu’il n’est pas revenu. On n’en sait rien.
Seulement les disciples se fâchent : « Qui peut être sauvé devant une telle liste de choses à faire ? Puisque lui qui avait tout FAIT comme il faut s’en va ! »
Et Jésus dit la phrase la plus importante, celle qu’il nous faut retenir ce matin : « Pour les hommes, c’est impossible, mais pas pour Dieu, TOUT est possible à Dieu. »
Et vous voyez comme tout est lié : maintenant on comprend cette parole de Jésus et cet épisode : bien sûr !
L’important ce n’est pas uniquement ce que l’on fait – c’est déjà important puisque Jésus voit ce qu’a fait le jeune homme et on nous dit qu’il l’aime. Donc c’est important, ce que l’on fait, mais ce n’est pas l’essentiel.
L’essentiel, c’est D’ABORD de laisser une place à Dieu dans notre vie, de le laisser, LUI, AGIR dans nos existences. D’écouter sa Parole avant d’agir dans nos journées.
Et c’est là que vient la deuxième lecture. Que découvrions-nous dans la première phrase de la deuxième lecture ? ELLE EST VIVANTE, LA PAROLE DE DIEU ! ELLE EST ENERGIQUE !
C’est d’abord elle qui agit dans notre journée. Si on l’écoute, si on la lit, si on la laisse faire…
Alors je me dis… si ce soir, chers Amis, nous revenions vers Dieu dans notre prière, et plutôt que de lui dire « regarde tout ce que j’ai FAIT dans ma journée » nous lui disions : « Seigneur, aujourd’hui j’ai essayé d’écouter ta parole. »
…c’est ce que vous êtes venus faire ce matin.
« Et puis j’ai essayé de te laisser la place, l’initiative, pour que tu viennes en moi… »
…c’est ce que vous recevrez à travers l’Eucharistie.
« Et ensuite, je t’ai laissé agir à travers moi. »
C’est lui, alors, qui vous expliquera tout ce qu’il a fait dans votre journée, parce que vous l’avez laissé faire.
- Seigneur, donne-nous la Sagesse de te laisser l’initiative, de te laisser passer devant, d’écouter ta Parole. Et alors nous te suivrons avec bonheur.
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Glion, 13 octobre 2024, 11.00
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