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Homélie pour le 14e dimanche TO, année A
Zacharie 9,9-10 / Psaume 144 / Romains 8,9.11-13 / Matthieu 11,25-30
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
Est-ce qu’il y en a parmi vous qui connaissent la légende de la marque de l’ange ? …Je pense aux Mamans, particulièrement… La légende de la marque de l’ange ne vous dit rien.
C’est une belle légende qui raconte qu’à la seconde où un bébé vient au monde, il sait tout. Il a toute la connaissance, y compris la connaissance de Dieu, bien sûr… et à ce moment-là, dit la légende, un ange vient lui dire de tout oublier et il lui pose le doigt sur la bouche, comme ça [geste CHUUUT]. D’où cette marque que nous avons tous entre le nez et la lèvre supérieure, la marque du doigt de l’ange.
…Et pour les gens qui parlent un peu plus que les autres, comme moi, il appuie un peu plus fort et, du coup, ça nous fait aussi une fossette au menton. Je la cache soigneusement avec ma barbe, mais je l’ai !
C’est une belle légende, je trouve, que celle de la marque de l’ange. Et comme toutes les légendes, elle vient nous dire quelque chose, certainement aussi, de la vérité.
Ça me rend tout joyeux quand je pense à cette idée que les tout-petits peut-être, au départ, connaissent tout.
La joie, vous savez, fait partie de l’ADN du Chrétien. Le pape François nous le dit souvent : un Chrétien qui n’aurait pas la joie en lui, il y aurait un problème. Alors bien sûr qu’il y a des jours avec et des jours sans ! Mais la joie doit faire partie de notre être chrétien.
Et notre première lecture, le prophète Zacharie, nous le disait très bien. C’est l’un des tout derniers prophètes de l’Ancien Testament, et c’est le prophète de la joie, véritablement. On trouve ce mot à plusieurs reprises dans son discours et c’était encore le cas ce matin.
La joie… Regardez un tout petit qui éclate de rire : il est entièrement JOIE. Tout son corps n’est rien que joie.
A chaque fois que je vois un tout-petit bébé qui éclate de rire, j’ai l’impression de voir un tout petit quelque chose de Dieu, qu’on me lève un coin de voile sur le mystère de Dieu.
Le thème des enfants, des tout-petits, Chers Amis, on le retrouvait aussi dans notre Evangile de ce matin, avec cette merveilleuse phrase de Jésus, très connue : « Ce que tu as caché, Père, aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. »
Et c’est vrai que les enfants, souvent, comprennent Dieu bien mieux que les grandes personnes avec leur logique compliquée. Eux, avec leur fraîcheur d’âme, avec la pureté de leur cœur, très souvent, ils comprennent bien mieux Dieu que nous.
Ça me rappelle, comme ça, un petit garçon qui avait voulu recopier le Notre Père, d’oreille… alors évidemment avec une orthographe un peu approximative… et notamment lorsqu’il s’agissait d’écrire « que ta volonté soit faite », il a écrit : « Que ta volonté soit FÊTE… » F-Ê-T-E… Que ta volonté soit une fête !
Et pourquoi pas ? C’est très juste, au fond ! Que ta volonté, Seigneur, procure la joie sur la terre, qu’elle soit une fête pour nous !
Ce n’est pas faux de voir les choses ainsi…
Ce petit bonhomme avait certainement mieux compris le Père que moi, avec toutes mes années de théologie.
Les enfants, voyez-vous, ont une connaissance de Dieu qui est très souvent parfaite et qui, malheureusement, s’en va avec l’âge adulte, avec le temps. Parce que nous, les adultes, nous sommes trop souvent rationnels, nous vivons dans le monde du palpable, de ce qui peut se toucher, se voir… nous sommes dans le monde de la chair comme le dit Paul, dans la deuxième lecture.
Mais les enfants, eux, sont encore dans le monde de l’esprit dont nous parlait Paul, aussi.
Eux ne sont pas encore sous l’emprise de la chair, sauf quand ils ont des besoins naturels, quand ils ont faim, eh bien ils ont faim, et là ils sont sous l’emprise de la chair, oui ! Mais il peut faire chaud ou froid à l’extérieur, s’ils sont en train de jouer, ils ne ressentiront ni la chaleur ni le froid parce qu’ils sont dans le monde de l’Esprit. Alors que nous, ces jours, la chaleur, on la sent hein ! On est sous l’emprise de la chair.
Seulement attention Chers Amis ! Ce serait probablement très réducteur de ne voir que les enfants lorsque Jésus parle des « tout petits ». « Père, ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. », ça ne veut pas forcément seulement dire « les enfants »…
Les tout-petits sont opposés aux sages et aux savants. C’est donc tous ceux qui ne sont pas savants… Et on est beaucoup dans cette église ce matin à ne pas être de grands savants, hein ! Il nous arrive donc parfois, nous aussi, d’être peut-être ces tout-petits à qui Jésus révèle son Père.
Parce que ceux qui croient savoir, Jésus ne leur révèle rien du tout. Dieu cache un certain nombre de choses à celles et ceux qui se croient plus intelligents que les autres. Parce que c’est l’orgueil qui nous fait nous croire plus intelligents que d’autres, qui nous fait penser qu’on sait tout, qu’on a tout compris.
Alors je ne vous raconte pas, nous, les théologiens, hein !
Nous qui avons appris tellement de choses au sujet de Dieu, nous qui avons fait tellement d’années d’études au sujet de Dieu… selon ce principe-là, on n’en sait rien du tout, en fait ! Moins que vous.
Et voyez-vous – je terminerai avec cela – lors du tout dernier examen de mes études de théologie jadis, alors que le grand savant dominicain qui m’interrogeait, qui me faisait passer cet examen, alors qu’il avait inscrit déjà solennellement la note qui validait toutes mes années d’études, ce grand religieux me regarde et me dit :
- Vincent, vous venez de faire cinq années de théologie, vous avez appris quantité de choses sur Dieu. Si vous ne deviez retenir qu’une seule d’entre elles, qu’est-ce que ce serait ?
J’ai réfléchi une seconde en me demandant si j’osais lui dire ce qui venait de me passer par la tête ! Et comme ce qui nous passe par la tête vient très souvent de Dieu, je me suis dit qu’il fallait que j’ose !
Alors je lui ai dit :
- Eh bien ce serait une phrase de St Augustin qui dit ceci : « Si tu comprends, ce n’est pas Dieu. »
…si tu comprends, ce n’est pas Dieu… Autrement dit: plus tu crois avoir compris, plus tu es persuadé d’avoir emmagasiné un grand nombre de connaissances sur Dieu, plus tu es persuadé de le connaître mieux que les autres… et plus tu es loin de lui.
Dans un premier temps, il a fait une grimace… c’est probablement pas la phrase qu’il attendait ! Mais après quelques secondes, vous savez ce qu’il a fait ? Il a éclaté de rire ! Tout à coup, il a laissé le petit enfant en lui s’exprimer ! Et il m’a dit : « C’est tellement vrai… » Et on a ri ensemble, bien sûr ! Tout à coup, nous étions plus proches de Dieu par cette joie qui nous habitait plutôt que toutes les connaissances que nous avions accumulées.
« Je te bénis, Père, ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. »…
Alors sachons redevenir tout petits devant Dieu, chers Amis. Parce que Dieu, au fond, ce n’est pas bien compliqué. C’est juste un rire d’enfant… et là-dedans, vous avez déjà une bonne part du mystère de Dieu !
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Bex, samedi 8 juillet 2023, 18.00
Aigle, dimanche 9 juillet 2023, 10.00 (version enregistrée)
Nathalie
Très belle homélie à nouveau, merci !
Hélas le monde est en train de salir l’âme et l’innocence de nos enfants…
Citoyens du Ciel, nous sommes dans le monde, mais pas du monde…