Qu’est-ce que j’ai fait faux ?

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Qu’est-ce que j’ai fait faux ?

Matthieu 13,1-23

Quand je rencontre des parents et plus encore même des grands-parents, cette question, revient très souvent : « Dites-moi, qu’est-ce que j’ai fait faux ? J’ai transmis la foi à mes enfants, à mes petits-enfants, et ils ne sont pas à la messe… Qu’est-ce que j’ai fait faux… ? » Probablement rien ! C’est ce que je leur réponds toujours. Et j’ajoute qu’il ne nous est pas demandé de réussir, mais simplement de semer.

Posez la question à un paysan – on en connaît suffisamment autour de nous : « Quand tu sèmes tes graines, dis-moi, est-ce que tu es certain de réussir ? » Il va éclater de rire ! Bien sûr que non, il n’est pas certain. Les produits qu’il retirera ou non de ce qu’il sème dépendent d’un certain nombre de paramètres, nous le savons bien ! Il y a de bonnes et de moins bonnes années, pas seulement pour le vin ! Il y a la météo, bien sûr, il y a la façon de semer, c’est un geste ancestral qui s’apprend, certes… Il y a la terre dans laquelle les graines tombent, j’y reviendrai. Il y a les gens qui marchent dessus ou non. Et tant d’autres paramètres encore… jusqu’à un incendie en Valais la semaine dernière, dont on a craint qu’il compromette certaines récoltes. Et ça passe, de la part du paysan, par des douleurs, par des angoisses, par des jours de désespoir même. Des jours où il crie vers le ciel en disant lui aussi : « Qu’est-ce que j’ai fait faux, Seigneur ? Pourquoi ça ne pousse pas ? »

Mais si le cultivateur ne sème rien, il est CERTAIN que rien ne va pousser. Sauf des mauvaises herbes, ça… elles poussent toujours ! Il en va de même pour la foi. Alors aux grands-parents désabusés qui me disent : « Oh, vous savez, nous, du coup, on leur parle plus de Dieu à nos petits-enfants, ça ne sert à rien… » eh bien je leur dis : « Là, pour le coup, vous êtes CERTAINS que plus rien ne va se passer, c’est sûr ! Si vous arrêtez de semer, rien ne va pousser sauf les mauvaises herbes, celles-là vous n’y échapperez pas ! »

Continuons de semer !

Continuons de semer, évidemment ! Le résultat n’est pas garanti. Jésus, dans l’Evangile de ce dimanche, l’explique très bien : parfois la semence tombe au bord du chemin et avant même qu’elle ait eu le temps de germer, des oiseaux passent et la mangent. Le semeur n’y peut rien ! Parfois, c’est le deuxième cas que Jésus nous propose, la semence tombe sur un sol peu profond. C’est formidable, elle lève tout de suite, c’est beau à voir ! Et puis, quelques jours plus tard, elle est brûlée par le soleil parce qu’elle n’a pas de racines… Quelques fois encore, c’est le troisième cas, ce sont les ronces qui étouffent la semence – qui était pourtant tombée dans de la bonne terre. Jésus explique cette parabole quelques versets plus loin : les oiseaux c’est le Malin, la terre peu profonde c’est le manque de racines dans notre vie, et les ronces ce sont les convoitises du monde.

Si on la transpose avec la question de nos grands-parents, cette histoire, ça pourrait donner ceci : transmettre la Parole à nos jeunes sans se demander s’ils la comprennent, c’est exactement le premier cas de la parabole. Le Malin va venir, il va prendre les graines et les manger.

Quand on transmet des traditions à nos jeunes, il faut aussi leur en expliquer le sens. Parce que sinon, on est dans le deuxième cas. Si on les fait venir à la messe en disant : « C’est comme ça, parce qu’on a toujours fait comme ça, ne me demande pas pourquoi… », on est exactement dans le deuxième cas de figure. Il n’y a pas de profondeur, il n’y pas de racines. Ça va peut-être lever, ils vont faire leur première communion, leur Confirmation, mais on ne les verra plus ensuite. Ils n’ont pas la force de continuer, ils n’ont pas de racines. Nos jeunes ont besoin de comprendre pourquoi on fait telle ou telle chose. Ils ont bien raison !

Troisième cas, si l’on transmet la Parole de Dieu à nos jeunes sans prendre garde aux ronces du monde, on est à peu près certain que ces ronces vont étouffer la parole dans la majorité des cas. Les ronces du monde ? L’argent, la gloire, les addictions… On peut transmettre la Parole de Dieu le mieux du monde, comme de merveilleux parents, comme de super grands-parents, si l’on n’a pas d’abord coupé certaines ronces, notre action risque bien d’être vaine.

Et si on transformait la question ?

On peut toujours se dire « Qu’est-ce que j’ai fait faux ? » Mais on peut transformer la question en se disant : « J’ai semé. Comment est-ce que je peux encore semer ? Qu’est-ce que je peux faire pour continuer à semer ? »

Alors… nous serons dans le quatrième cas de la Parabole : la Parole de Dieu portera du fruit en eux, et non seulement elle portera du fruit mais eux aussi vont la transmettront un jour.

Vincent Lafargue

Publié sur www.cath.ch le 14 juillet 2023

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