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Homélie pour le 26e dimanche TO, année C
Amos 6, 1a.4-7 / Psaume 145 / Luc 16, 19-31
Pour St Nicolas-de-Flüe : Romains 14,17-19
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
J’aimerais quelques instants vous ramener en arrière, un bon nombre de décennies en fait :je vous ramène plus de 40 ans en arrière. Pour certains d’entre nous c’est de l’inconnu – [aux servants :] vous n’étiez pas nés tous les deux – pour certains d’entre nous qui sont jeunes depuis plus longtemps que les autres c’était hier, disons avant-hier.
Je vous ramène précisément il y a 43 ans, dans une période qui va du 17 octobre 79 au 10 décembre de cette même année 79. J’imagine que cela ne vous dit rien comme ça… Mais peut-être que certains d’entre vous, lorsque j’aurai expliqué de quoi il s’agit, se souviendront de cet élément.
Peu avant ce 17 octobre 1979, une lettre part de Stockholm, en Suède. Cette lettre est adressée à une certaine Madame Agnès. Agnès Gonxhe Bojaxhiu pour être précis. La lettre traverse l’Europe et elle se rend en l’Asie par l’avion qui l’emmène jusqu’en Inde.
Elle contient un message très important, cette lettre, qui provient de l’académie Nobel. C’est un prix Nobel que contient cette lettre. Et pas n’importe lequel, un prix Nobel de la paix.
Il est décerné cette année-là à cette femme prénommée Agnès.
En Inde, les postes l’acheminent jusqu’à la ville de Calcutta. Jusqu’à une certaine rue. Un certain hôpital. Et le facteur la remet, cette lettre, à une petite dame en sari bleu et blanc. Agnès Gonxhe Bojaxhiu, c’est son nom de baptême, mais le facteur l’appelle « Mother », Mère. Et c’est ainsi que nous la connaissons, sous son nom de religieuse, Mère Teresa.
Elle ouvre la lettre et elle découvre, un peu étonnée, cette distinction qu’on lui décerne au nom de son œuvre auprès des plus pauvres, des plus déshérités de ce monde.
Plus tard elle avouera qu’elle a longuement hésité à accepter ce prix… Mais elle a décidé de l’accepter, non pas pour elle, mais au nom de tous ceux qui souffrent, de ceux qui meurent.
Elle refuse ce prix pour elle-même, mais elle l’accepte pour les autres.
La remise du prix, solennelle, devant les grands de ce monde, est prévue le 10 décembre de la même année 79, à Stockholm, en Suède.
Et entre ces deux dates, elle réfléchit. Et il se passe quelque chose de peu connu, de peu raconté. Peut-être parce que nos médias traditionnels ont un peu honte de nous le dire ou sentent confusément que la petite dame de Calcutta a accompli là un geste prophétique, très éloigné du bling-bling des premières pages des magazines mais tellement proche de Jésus et de l’Evangile. Un geste qui lui ressemble, à elle, au fond.
Qu’est-ce qu’elle a fait ?
Eh bien elle écrit, elle répond. Quand on reçoit une lettre, c’est bien normal. Elle écrit pour accepter ce prix, comme je l’ai indiqué, non pas pour elle mais pour les plus démunis. Mais elle ajoute une exigence… Mère Teresa avait un sacré caractère, vous savez…
Elle ajoute une exigence : elle exige que le banquet qui était prévu en son honneur le 10 décembre – à partager avec les grands de ce monde – que ce banquet soit annulé, et que l’on distribue l’argent qui aurait servi à ce banquet… aux pauvres. L’argent qui aurait servi au champagne, aux petits fours, au caviar, etc.
Permettez-moi de vous relire le début de l’Evangile qu’on vient de ré-entendre : « Le pauvre aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais c’était plutôt les chiens qui venaient lécher ses plaies. »
Eh bien, Frères et Soeurs je le crois, peu de gens ont compris et appliqué cet Evangile comme Mère Teresa ce jour-là. Sainte Mère Teresa doit-on dire aujourd’hui puisque, vous le savez, elle a été canonisée le 4 septembre 2016, par notre pape François.
Alors bien sûr, vous allez me dire que nous ne sommes pas tous et toutes des Mère Teresa. Nous ne sommes pas tous des saints, moi le premier. Mais nous avons tous vocation à le devenir.
Être un saint ou une sainte, ce n’est pas être quelqu’un de parfait. Mère Teresa ne l’était pas. C’est accomplir tel ou tel geste prophétique dans notre vie, tel ou tel geste à la suite du Christ. Et ça, nous pouvons tous le faire.
Nous appliquons l’Evangile à notre portée, chez nous, à notre porte à nous avec nos pauvres à nous. Et c’est déjà pas si mal quand nous pouvons le faire parce que c’est pas simple d’arriver nous-mêmes, parfois, à payer les factures, surtout en ce moment.
Mais s’agit-il bien de payer des factures, dans cet Evangile ? S’agissait-il bien de cela le 10 décembre 1979 ?
Pas sûr.
Vous savez, ce qui se dégage d’une parabole, Jésus en racontait une dans l’Evangile, ce qui se dégage d’une parabole c’est son sens plus mystérieux. Pas ce qui nous apparaît au premier abord.
Qu’est-ce que dit Jésus dans cette parabole ?
Que l’homme riche, mort, est dans la tourmente. Il demande à Abraham d’ouvrir les yeux des gens qui sont encore sur terre. Et Abraham lui répond qu’il y a des gens qui s’en chargent. Moïse, les prophètes, et les prophètes d’aujourd’hui. Mère Teresa par exemple.
Qu’est-ce qu’a fait Mère Teresa en répondant à cette lettre ? Elle a posé un geste de prophète, un geste d’avertissement, un geste d’exemple.
Ce n’est pas SON argent qu’elle a donné. C’est l’argent superflu qui lui aurait été donné pour fêter et qu’elle refusait pour elle-même. Ce n’est pas tout à fait la même chose. Mère Teresa se savait riche de beaucoup de choses et elle en faisait don aux pauvres bien sûr. Son temps, son affection.
Ce n’est pas forcément de l’argent qu’il convient de donner à notre prochain. C’est d’abord lui ouvrir la porte, c’est d’abord l’écouter, c’est d’abord prendre du temps avec elle ou avec lui. De cela nous sommes tous riches. Nous avons tous une porte à ouvrir, nous avons tous du temps, nous avons tous deux oreilles pour écouter.
Personne n’en a quatre, on en a tous deux. Alors elles fonctionnent plus ou moins bien, d’accord. Mais à priori, ça, on peut le donner.
Alors Frères et Sœurs, sachons prendre ce temps, offrir cette écoute à celui, à celle qui en a besoin.
Amos, qui était lui aussi prophète de son temps, dans la première lecture disait : « Malheur à ceux qui se vautrent sur des lits d’ivoire… » On n’en est pas là, hein ! Je n’ai encore jamais vu un lit d’ivoire à Aigle mais si vous en avez un chez vous, signalez-vous !
Nous appliquons notre charité comme nous le pouvons autour de nous et nous ne faisons pas partie des très riches dont Amos parle pour les fustiger. Mais la charité n’est pas réservée aux saintes et aux saints, aux gens comme Mère Teresa. La justice, la miséricorde, font partie du Royaume de Dieu, notre 2e lecture le disait très bien.
Et c’est à nous de faire justice, de faire miséricorde, parce que c’est nous qui construisons ensemble ce Royaume.
Nous avons des exemples, Saint Nicolas-de-Flüe, Saint Maurice et ses Compagnons, que nous célébrons aujourd’hui. Nous avons des exemples plus proches, Mère Teresa par exemple et tant d’autres. Et puis nous avons des exemples anonymes. Des personnes autour de nous qui posent aussi, tous les jours, des gestes d’amour, de charité, parfois tout simples. Venir allumer une bougie ici, pour prier pour quelqu’un, c’est un geste d’amour.
Vous voyez qu’il n’y pas besoin de faire grand-chose pour poser des gestes prophétiques dans notre monde.
Je prie avec vous, Chers Amis, et pour vous. Et je te dis MERCI Seigneur de nous ouvrir les yeux au travers de toutes ces personnes que tu places sur nos chemins de vie, les prophètes, qui posent des gestes. Aide-nous à les suivre à notre niveau, avec nos simples moyens, mais avec leur enthousiasme et toute leur Foi. Amen.
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Aigle, dimanche 25 septembre 2022, 10.00
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