Même pas touché !

Classé dans : Homélies, Méditer | 0
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Chers Amis,

Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais pour ma part pendant longtemps j’ai prononcé cette phrase : « Oh moi, vous savez, je suis comme Saint Thomas, j’ai besoin de toucher pour croire ! » Je vois à certains sourires que je ne suis peut-être pas le seul à avoir prononcé cette phrase ! Mais je ne la prononce plus. Pourquoi ? Parce qu’on m’a expliqué cet Evangile.

En réalité, on a l’esprit complètement faussé très souvent par rapport à cet évangile que nous connaissons bien. On a l’esprit faussé, notamment à cause des tableaux. Celui du Caravage, très connu, où Thomas enfonce son doigt dans la chair du Christ. On voit même la chair se plier sous l’effet du doigt de Thomas.

Alors le Caravage est un peintre trop immense et illustre pour qu’on le critique. Mais sur ce coup-là, malheureusement il n’avait pas tout compris parce qu’on ne lui a pas expliqué cet épisode. Car chers amis, avez-vous bien écouté cet évangile ? À aucun moment il n’a été dit que Thomas touche Jésus. A aucun moment.

Pauvre Thomas ! On a rabaissé sa foi bien plus bas qu’elle ne l’est en réalité !

Je vous recite le passage parce que je vois dans vos yeux que vous êtes en train d’essayer de vous souvenir de ce que vous avez réellement entendu… Je vous récite le passage de cette scène que vous connaissez pourtant par cœur. Mais, comme moi jadis, vous êtes peut-être persuadés d’avoir l’image de Thomas qui touche Jésus. Or non…

Dans un premier temps, une semaine avant, en l’absence de Jésus, Thomas a effectivement dit : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne touche pas la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son coté, non, je ne croirai pas ! »

Il l’a dit, c’est ce qu’il a l’intention de faire. Mais entre avoir l’intention de faire quelque chose et faire effectivement cette chose, il y a parfois une nuance gigantesque ! Nous le savons bien : chaque premier janvier, nous avons l’intention de faire de très bonnes résolutions. Puis parfois, elles s’envolent assez rapidement, faut bien le dire.

Donc entre vouloir faire et faire, il y a une nuance, on le sait bien…

Dans notre Evangile vient ensuite – une semaine plus tard, une semaine après Pâques donc aujourd’hui – le jour où Jésus est à nouveau là, mais cette fois-ci en présence de Thomas. Et Jésus, qui est un formidable pédagogue, redit à Thomas les paroles que Thomas avait dites en son absence : « Vas-y ! Avance ton doigt, avance ta main, mets la dans mon côté… »

Et puis il y a un silence, et Jésus dit : « Cesse d’être incrédule, sois croyant ! »

Que se passe-t-il ensuite ? Thomas dit simplement : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Est-ce qu’il avance sa main et qu’il touche Jésus ? Ce n’est absolument pas dit !

Si Thomas avait dû toucher, on pourrait le taxer d’incrédulité…

Mais Thomas, sur la parole de Jésus – « Cesse d’être incrédule, sois croyant ! » – Thomas devient croyant, pleinement, à ce moment-là, il n’a justement pas touché pour cela.

Alors vous me direz : « Il l’a peut être fait, mais le texte ne le dit pas… » D’ailleurs, la fin de notre Evangile disait : « Il y a beaucoup d’autres choses, mais elles ne sont pas toutes écrites dans ce livre. »

Vous auriez raison s’il n’y avait pas la phrase de Jésus qui suit immédiatement. Qu’est-ce que Jésus dit ? « Parce que tu m’as VU, tu crois. »  Eh oui ! Jésus ne dit pas « parce que tu m’as touché, tu crois », c’est bien le signe que Thomas n’a pas eu besoin de toucher, précisément. …Parce que tu m’as vu, tu crois…

Et Jésus l’invite désormais à faire un pas de plus : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ! » …qui sont ces gens qui croient sans avoir vu ? Mais c’est vous. Et moi. Jésus parle de nous dans ce texte !

L’Évangile n’est pas un vieux texte d’il y a 2000 ans, vous le savez bien ! L’Evangile vient toujours nous dire quelque chose dans l’aujourd’hui de notre vie. Et l’Évangile parle de nous ce matin : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu », c’est nous !

Contrairement à Thomas, nous croyons sans avoir eu besoin de voir. 2000 ans après, tout ceux qui nous ont précédés comme nous, nous croyons sans avoir eu besoin de voir.

Alors nous voyons les effets de l’existence de Dieu ! C’est comme si on demandait à un de ces enfants, maintenant, de nous dessiner le vent… On serait bien en peine de dessiner le vent ! On ne le voit pas. Est-ce pour cela qu’il n’existe pas ?… Bien des gens vous disent : « on l’a jamais vu ton Dieu, c’est bien la preuve qu’il existe pas ! » …Ah oui, et le vent ? Il n’existe pas, peut-être ?

Vous le voyez, parce que vous en voyez les effets. Quand il y a du vent, le drapeau flotte, mais c’est le drapeau que vous voyez, ce n’est pas le vent. Vous en voyez les effets.

Eh bien, c’est pareil pour Dieu :

  • Quand deux personnes s’aiment, nous voyons Dieu.
  • Quand quelqu’un fait un geste de charité, d’amour, nous voyons Dieu.
  • Quand des ennemis font la paix, nous voyons Dieu, nous voyons ses effets.

Donc nous ne sommes pas tout à fait quand même des gens qui n’ont jamais rien vu. Nous voyons les effets de Dieu et nous croyons, grâce à cela.

Notre vie doit maintenant refléter l’existence de Dieu, être faite de charité, de partage. C’est la première lecture, le Livre des Actes, qui nous rappelait qu’ainsi vivaient les premiers chrétiens.

Il nous revient de montrer Dieu par notre vie, même si nous ne l’avons pas vu, par nos actes, par notre espérance. C’est ce que nous rappelait la deuxième lecture. Nous avons à avoir une vie habitée par l’Esprit-Saint, désormais. Une vie habitée par la foi.

Alors nous sommes au moins aussi croyants que Thomas.

Voire même un peu plus, puisque nous… nous croyons sans avoir vu. Mais enfin, on ne va pas se mettre au-dessus des Saints, quand même ! Laissons Saint Thomas à sa place et restons sagement en-dessous.

Alors, Chers Amis, si certains d’entre vous étaient comme moi, si vous répétiez à l’envi cette phrase – oh, moi, vous savez, je suis comme Saint Thomas… – eh bien, grand bien vous fasse d’être comme Saint Thomas ! C’est un modèle de foi. C’est le modèle des croyants, celui qui n’a même pas eu besoin de toucher pour croire alors qu’il avait dit qu’il le ferait…

Soyons comme Saint Thomas, soyons des modèles de foi. Croyons, non seulement à ce que nous voyons – les effets de la présence de Dieu – mais croyons aussi parce que nous n’avons jamais vu. Devenons les témoins de tout cela !

Notamment en ce temps de Pâques, redisons autour de nous que ce n’est pas parce qu’on ne voit pas Dieu qu’il n’existe pas. Et si vous tombez vraiment sur une personne récalcitrante, n’oubliez pas l’exemple du vent… je ne l’ai pas tiré de ma propre imagination, c’est Jésus qui l’enseigne à Nicodème, dans une autre page d’Evangile.

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Champex-Lac, samedi 6 avril 2024, 17.00

Aigle, dimanche 7 avril 2024, 10.00

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