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Unité
La traditionnelle semaine de prière pour l’unité des Chrétiens se vit chaque année du 18 au 25 janvier. C’est l’unité qui y est demandée et non pas l’uniformité. La différence est au moins aussi importante que celle qui existe entre un verre d’eau et un cocktail de fruits…
Le Christ souhaite « que tous soient UN comme toi, Père, tu es en moi et que je suis en toi ». Or s’il y a unité dans la Trinité, il n’y a pas uniformité. Nous avons un seul Dieu en trois personnes distinctes. Dès lors, n’est-il pas évident d’avoir un seul Christianisme en plusieurs Eglises distinctes ?
Certes il y eut l’œcuménisme de (grand)-papa qui souhaitait que l’on parvienne à une seule liturgie, à l’uniformité de rite et de dogmes, à ce qu’il n’y ait plus aucune différence entre Chrétiens, ça s’appelle l’uniformité. Pas l’unité. Heureusement, il y a l’œcuménisme d’aujourd’hui, dont j’aime à rappeler le dynamisme et dont le pape François, tout comme ses prédécesseurs, affirme qu’il s’agit d’un devoir de tout Chrétien et non d’une matière théologique optionnelle.
L’œcuménisme d’antan ressemble à un banal verre d’eau, celui d’aujourd’hui à un étonnant cocktail de fruits.
Je m’explique. Lors du premier mouvement de l’œcuménisme, celui dans lequel s’inscrivent la plupart des initiatives prises pendant le XXe siècle, notamment depuis les années 70, on cherchait l’unité par un mouvement qui faisait disparaître les différences. Comme une équipe de scientifiques rechercherait l’eau pure, l’absolue transparence, la totale absence de goût parasite. C’est l’époque où l’on a « épuré » tous nos rituels œcuméniques : il ne fallait pas dire tel ou tel mot, cela offenserait les catholiques, il ne fallait pas faire tel ou tel geste, tel ou tel signe, éviter tel ou tel objet, cela choquerait à coup sûr les frères et sœurs de la Réforme. Il fallait célébrer, bien évidemment, en blanc et sans aucun autre signe distinctif, quel que soit le ministre.
Les divisions attaquent l’œcuménisme… mais les différences l’enrichissent.
Or le mouvement œcuménique tend vers l’unité et non l’uniformité. Autrement dit, si les divisions l’attaquent, les différences peuvent l’enrichir. Il gagne à ne pas les gommer, mais au contraire à les connaître, à les découvrir, à se laisser interroger par elles, à les admirer.
Cela me fait penser à un cocktail multicolore. Ces ensembles fruités que l’on nous fait goûter en nous mettant au défi de retrouver tous les ingrédients qui ont formé ce bel ensemble, cette belle unité de goûts si différents, au départ.
Une célébration œcuménique, aujourd’hui, peut être présidée par un prêtre à étole colorée, par un pasteur en robe noire. On peut faire un signe de croix au début, un geste de bénédiction à la fin, y écouter une véritable prédication réformée, y inclure une prière d’illumination, et se laisser rejoindre par tant d’autres de nos spécificités.
Il me semble tellement plus intéressant de goûter à tous ces fruits avec la jubilation des bons vivants qui savourent les différences, plutôt que d’avaler un verre d’eau avec l’air un peu pincé et la tête penchée des perfectionnistes qui semblent nous dire “c’est bien mais ce n’est pas encore ça“…
Alors tous à nos cocktails ! Et n’oublions pas de secouer un peu, ça mélange…
Vincent Lafargue | 15 janvier 2021
pour le site www.cath.ch
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