Tu es chrétien ? Donc, tu ne fais pas de politique…?

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Homélie pour le 29e dimanche TO, année A

Isaïe 45,1.4-6 / Psaume 95(96) / 1ère aux Thessaloniciens 1,1-5b / Matthieu 22, 15-21

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

Chers Amis,

Si je vous dis que tous les chiens sont mortels, vous êtes d’accord avec moi, j’imagine ? Hélas pour les propriétaires de chiens !

Si je vous dis que je suis mortel, vous êtes d’accord avec moi aussi, j’imagine ? Mais tant que je serai en vie, si je peux célébrer ici, je le ferai.

Tous les chiens sont mortels, or je suis mortel… donc je suis un chien !

Là vous êtes moins d’accord ! Pourtant, le raisonnement est imparable… On appelle ça, en langage savant, un paralogisme. Oui, alors j’ai dû chercher aussi, hein, je ne savais pas…

Les deux premiers arguments – les deux prémisses du raisonnement – sont parfaitement exacts. Tous les chiens sont mortels : c’est vrai ; je suis mortel : c’est vrai.

C’est la conclusion qui en est tirée – pourtant de manière tout à fait honnête – qui est fausse : je ne suis pas un chien. Enfin j’espère !

Et on peut en faire de toutes sortes, des paralogismes, vous savez : toutes les femmes vivent sur terre, or je vis sur terre, donc je… eh bien non, je ne suis pas une femme, non.

Tous les chats aiment le lait, mon frère aime le lait, donc mon frère serait un chat ? Non, ça ne va pas non plus !

Vous voyez l’idée du paralogisme : Les deux premiers arguments sont parfaitement exacts, mais la conclusion est fausse.

Et pourquoi la conclusion est fausse ? Parce qu’on ne peut pas tirer de conclusion de deux arguments qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre. Je ne suis pas un chien, donc je ne peux pas comparer ma mort à moi et celle des chiens. Mon frère n’est pas un chat, on ne peut pas comparer le fait qu’il aime le lait avec les chats qui aiment, eux aussi, le lait. Etc, etc…

L’évangile de ce soir a donné cela, un magnifique paralogisme, dans la plupart des esprits, et on trouve encore des gens qui le commentent comme ça : Jésus dit « rendez à César ce qui est à César et rendez à Dieu ce qui est à Dieu. »… or César est sur la pièce d’argent, donc Dieu n’aime pas l’argent. Faux !

Mais dans la plupart des esprits, pendant longtemps, on a commenté ce texte comme ça : rendez à César ce qui est à César, l’argent, rendez à Dieu ce qui est à Dieu, la prière, la foi, toutes sortes d’autres choses mais surtout pas l’argent !

 Non, ça n’a rien à voir. La conclusion est fausse parce que César n’est pas comparable à Dieu, on ne peut pas comparer les deux prémisses de l’argument. Et cet évangile a très souvent été mal compris, précisément à cause de cette mauvaise conclusion

Quel est le problème que veut vraiment montrer Jésus aux Pharisiens, alors ?

Eh bien justement, que Dieu et César ne sont pas comparables. Et qu’il ne faut pas les mettre sur le même plan. Le pouvoir terrestre, c’est une chose, la gloire divine, c’est une autre chose. Même chose avec les chiens et moi : ce n’est pas comparable.

L’erreur serait justement de comparer et d’en tirer une conclusion. Et on l’a fait très-très-très souvent avec cet Evangile et avec l’argent et avec Dieu.

Exemple, tu es prêtre, homme de Dieu ? Donc tu ne te mêles pas de César… et donc tu ne fais pas de politique !

J’ai lu ça encore cette semaine, hein, dans un journal : « les chrétiens ne doivent pas se mêler de politique, rendez à César ce qui est à César, à Dieu ce qui est à Dieu… » c’est absurde, c’est faux ! On ne peut pas tirer cette conclusion-là ! Et pourtant bien des gens le font.

Si on est chrétien, précisément, on se mêle de politique ! Et je ne dis pas ça parce qu’on a tous rempli nos enveloppes de votation.

Mais parce que nous sommes pour le bien commun, nous les Chrétiens. Or la politique est précisément ce qui regarde le bien commun, ce qui devrait regarder le bien commun en tout cas.

Donc ça nous regarde, évidemment.

Autre paralogisme facile : « tu vas à l’Église, tu es chrétien, donc tu dois être pauvre puisque Dieu n’a rien à voir avec l’argent : ‘rendez à César ce qui est à César et à Dieu, ce qui est à Dieu’… » C’est absurde.

Bien sûr que, lorsqu’on est chrétien, on a souci des pauvres ! Mais il n’y a pas que des pauvres à l’Église, heureusement !

Donc Jésus essaie de montrer à ses interlocuteurs que Dieu n’est pas sur le même plan que nous. Que sa vision des choses n’a rien à voir avec la nôtre.

Le psaume, vous l’avez entendu, parlait de la gloire du Seigneur.

Et là, c’est le même principe : la gloire pour nous, c’est la première page des magazines. Encore que, faites-moi confiance, ce n’est pas toujours facile d’être en première page du Nouvelliste, hein !… Mais la gloire, pour plein de gens, c’est ça, c’est d’être connu. Mais la gloire de Dieu n’a rien à voir avec ça, rien.

La première lecture nous montrait la même chose : on n’est pas du tout dans des catégories humaines, habituelles. Le pouvoir de Dieu dont parlait la première lecture, le pouvoir de son Messie, c’est précisément le pouvoir aux mains vides !

La couronne de notre roi, c’est une couronne d’épines… son trône, c’est une croix… son carrosse, c’est un petit âne… La gloire de Dieu n’a rien à voir avec la gloire de notre monde !

Demandez à un dirigeant politique si pour lui, le pouvoir, c’est le pouvoir aux mains vides, vous allez voir ce qu’il va répondre…

Et Paul à sa manière dans la deuxième lecture, le disait aussi. L’annonce de l’Evangile, disait Paul, c’est loin d’être simplement une lecture de texte. C’est un acte puissant qui amène une action de l’Esprit-Saint. Ce n’est pas rien !

L’action de l’Esprit-Saint, en nous, c’est ce qui nous permet de faire des miracles, à vous comme à moi, hein ! Si on le laisse agir ! Le problème c’est qu’on lui fait souvent obstacle. On ne le laisse pas toujours faire.

Donc, chers amis, que conclure de tout cela ? Eh bien que Dieu ne raisonne pas de la même manière que nous. On aimerait bien, des fois : « Seigneur, je suis en retard à la messe, donne-moi une place de parc, s’il te plaît ! »  Et ça ne marche pas !

Alors qu’est ce qui se passe ? Il n’écoute pas nos prières ? Si ! Mais il raisonne peut-être un peu différemment de nous : « Tu n’avais qu’à partir plus tôt, tu aurais eu ta place de parc… »

Ça, c’est la manière qu’a Dieu de raisonner.

Alors évidemment, ce n’est pas toujours simple de se dire que les voies de Dieu ne sont pas les nôtres, que pour lui « 1000 ans sont comme un jour », qu’il raisonne à sa manière à lui… Parce qu’on aimerait bien, quand on voit les horreurs dans le monde, lui dire : « Mais enfin, fais quelque chose ! »

Contre le mal qui vient des hommes, il est parfois bien impuissant, contre notre libre arbitre.

Mais à travers tout cela, il nous donne des signes, en général. C’est à nous de savoir les lire. À nous de nous rappeler que sa manière de voir les choses n’est pas la nôtre, que ce qui nous semble bien n’est pas toujours, à vues humaines, bien pour nous… et que ce qu’il sait être bon pour nous, Lui, à vues divines, on ne l’a pas toujours tout de suite sous les yeux.

Ne plaquons donc pas notre logique sur les plans de Dieu, ce serait faux. Laissons-le faire.

Occupons-nous de nos affaires humaines. Rendons à César, au monde, au pouvoir terrestre, ce qui appartient au pouvoir terrestre.

Et laissons à Dieu ses affaires à lui rendons à Dieu ce qui lui appartient, sa façon de voir les choses et notre salut, parce que c’est cela qui l’a en vue de toutes manières.

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Champex, samedi 21 octobre 2023, 17.00

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2 Responses

  1. Jean-Maurice Tornay

    Encore mille mercis, Cher Vincent, pour la très belle messe célébrée à Champex-Lac. Et merci d’avance de nous revenir en novembre.

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