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Homélie pour la Solennité de la Croix Glorieuse
Nb 21,4b – 9 / Psaume 77(78) / Ph 2,6 – 11 / Jean 3, 13-17
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
Pas simple, cette phrase du credo : « il reviendra juger les vivants et les morts. »
Autant être honnête avec vous, quand j’étais ado, j’étais révolté. C’est sûrement un pléonasme, tous les ados sont révoltés ! Mais quand j’étais ado, j’étais révolté, entre autres, par cette phrase. Parce que juger… alors que précisément, on nous dit qu’il ne faut pas juger… Alors Dieu, lui, sait comment juger, bien sûr. Nous, on ne doit pas… Mais dans l’expression « juger », il y avait le juge du tribunal, et c’est quand même quelqu’un à qui on n’aime pas trop avoir affaire…
Quand j’étais ado, j’étais révolté par une autre chose dans notre religion chrétienne, c’est ça : [une croix s’affiche à l’écran].
Je ne comprenais pas pourquoi les Chrétiennes et les Chrétiens avaient choisi ce signe-là pour dire l’amour, un instrument de torture, cette croix sur laquelle Jésus a souffert pendant des heures et a fini par mourir.
Je ne comprenais pas.
Et puis c’est un petit bonhomme haut comme ça, il devait avoir 4 ou 5 ans, qui un jour, alors que j’expliquais cela, m’a dit : « Mais la croix, c’est un signe d’amour ! »
Et comme je ne voyais pas ce qu’il voulait dire, il m’a dit : « Regarde, il suffit de relier les pointes. Regarde ! C’est un signe d’amour ! » [un cœur entoure la croix affichée à l’écran] Je ne peux plus regarder une croix sans voir le cœur que ce petit bonhomme m’a tracé ce jour-là !
Les enfants sont souvent de bien meilleurs théologiens que les adultes avec toute leur science.
Ce petit bonhomme avait compris quelque chose d’essentiel : Jésus est mort sur la croix par amour pour nous. C’est l’acte d’amour le plus suprême possible que de donner sa vie pour ceux qu’on aime !
Et puis il a donné sa vie également pour nous sauver. Ça, c’est l’Évangile qui nous le disait ce soir.
Ce dialogue entre Jésus et Nicodème, dont nous avions un petit extrait, dans lequel vous avez entendu cette phrase : « Dieu a envoyé son fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que par lui le monde soit sauvé »…
…Non pas pour JUGER le monde, mais pour que par lui le monde soit sauvé !
Quand j’ai découvert cette phrase, j’ai encore moins compris la phrase du Credo – il reviendra juger les vivants et les morts – alors que, dans la Bible, c’est marqué que Dieu ne l’a précisément pas envoyé pour juger, mais pour sauver.
Gardez ça dans un coin de la tête.
Il nous sauve sur la croix, il nous sauve.
Et évidemment, ça rappelle à celles et ceux qui connaissent la Bible, ce passage de l’Ancien Testament qu’on a entendu en première lecture, le Livre des Nombres, quand le peuple dans le désert a commis le péché le plus suprême possible – le plus grand de tous les péchés, c’est croire que Dieu nous a abandonnés, je crois qu’il n’y a rien au-dessus de cela – et eux font plus encore : ils disent « non seulement Dieu nous a abandonné, mais il veut notre mort ! C’est pour ça qu’il nous a emmené dans ce désert ! »
Quand on blasphème, il faut s’attendre à avoir des petits problèmes, en général… et c’est ce qui leur arrive. Des serpents viennent les mordre et certains meurent parce qu’ils n’ont pas converti leur regard. Ils voient Dieu comme quelqu’un de méchant qui veut leur mort.
Quand ils comprennent enfin, ils viennent dire à Moïse : « Excuse-nous, on n’avait pas compris, demande à Dieu de nous sauver ! »
Dieu n’est pas celui qui fait mourir, il est celui qui sauve. Et alors que fait Dieu ? Et bien vous l’avez entendu, il dit à Moïse : « Fais-toi un serpent sur un mât et montre-le. Ceux qui seront mordus le regarderont et ils seront guéris. »
Ça ne vous rappelle rien, ça ?
Regardez ! [à l’écran s’affiche le logo d’une pharmacie] Devant toutes les pharmacies, il y a la Bible ! Fais-toi un serpent sur un mât, regarde-le et tu seras guéri ! Le symbole, le caducée, le symbole de la médecine, vient de la Bible, Chers Amis.
Eh oui, on regarde, on voit que c’est une pharmacie et on sait que, là, on pourra trouver de quoi nous guérir.
J’avais un oncle qui était pharmacien et il m’a expliqué plus encore à ce sujet. Parce que je m’étonnais quand même : le serpent, ce n’est pas tout à fait ce qui guérit ! Mais dans l’idée de Dieu, regarder ce qui nous fait du mal, ça peut nous guérir.
Eh bien mon oncle m’a expliqué que, dans la nature, c’est en général juste à côté du poison que se trouve l’antidote.
Juste à côté de la plante qui nous fait du mal se trouve celle qui peut nous guérir. Il suffit de regarder. Et c’est très souvent, aussi, à partir d’un poison que l’on fait son remède. C’est le cas pour les serpents d’ailleurs.
C’est donc en acceptant de regarder en face ce qui nous fait peur, ce qui peut nous faire mourir, qu’on a une chance d’être sauvé.
Seulement, regardez bien… ce n’est plus tout à fait un bâton. Il y a le manche, certes, mais au-dessus il y a une coupe.
Parce que Jésus est passé par là. Ce n’est plus l’Ancien Testament, ce n’est plus Dieu qui envoie des serpents pour punir le peuple et qui finit par donner l’antidote : « Mets le serpent sur un mât et tu verras, tu seras sauvé. »
Non, Jésus, lui, il s’est laissé dresser sur le mât de la croix pour définitivement nous sauver.
La coupe, c’est la coupe du sang du Christ, c’est la coupe de ce qui nous sauve définitivement.
« Il s’est anéanti », disait notre deuxième lecture. « Il s’est abaissé jusqu’à la mort » pour nous relever, pour nous relever définitivement, non pas pour juger, mais pour sauver.
Avec tout ça, je n’ai toujours pas la réponse à ma première question : pourquoi, alors, dans le Credo, continue-t-on de dire : « il reviendra JUGER les vivants et les morts ? » Pour le comprendre, il me fallait encore quelques années, le temps d’aller étudier un peu l’hébreu. Et de comprendre que, dans la langue de Jésus, en réalité, les choses sont un peu différentes.
Parce que le juge que nous, nous voyons comme ce personnage du tribunal, qui est un peu inquiétant, dans l’esprit de la langue de Jésus ce n’est pas la même chose.
Dans l’esprit de la langue de Jésus, juger c’est sauver.
Ah ça change tout, alors !
« Il reviendra juger les vivants et les morts » signifie, dans la langue de Jésus, « il reviendra SAUVER les vivants et les morts. »
Pensons-y, Chers Amis, la prochaine fois que nous réciterons le Credo, dans quelques instants, dans quelques minutes.
Et puis redisons autour de nous ces quelques éléments :
- la croix, bien sûr que c’est le signe de l’amour total. Il suffit de relier les pointes.
- sur cette croix, Jésus, un jour, est venu prendre tous nos péchés pour nous sauver.
- Il reviendra, oui, il reviendra pour nous sauver à sa manière.
L’Evangile de Jean le dit un peu plus tard : « Quand j’aurai été élevé sur cette croix, j’attirerai à moi tous les hommes ! »
Laissons-nous attirer par la croix qui est définitivement un signe d’amour et rien d’autre.
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Bex, samedi 13 septembre, 18 h.
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