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Homélie pour la Commémoration des Fidèles Défunts
Job 19,1.23-27 / Psaume 62 / Philippiens 3,20 – 4,1 / Matthieu 11, 25-28
- D’après une idée de Mgr Norbert Brunner, ancien évêque de Sion
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Qui d’entre vous, Chers Amis, dans son enfance, n’a pas joué à ce petit jeu : se cacher le visage et dire : [se cachant le visage dans les mains, enfantin] Je suis caché ! Vous me voyez plus ! Je ne suis plus là…
… [enlevant les mains] On sait bien que, pour les enfants, ce qui est caché n’existe plus – jusqu’à un certain âge, bien sûr !
Quand on leur cache un objet, il est parti… quand ils se cachent derrière un rideau c’est qu’ils n’existent plus… quand ils se cachent derrière leurs mains c’est qu’ils sont invisibles…
C’est beau, la pureté de l’âme des enfants.
Après, bien sûr, ils deviennent de grandes personnes, ils évoluent comme on dit, ils grandissent. Et les adultes ne se cachent plus derrière leurs mains en pensant qu’on ne les voit pas, bien sûr.
Eh bien je vais vous en dire une bien bonne, Chers Amis : nous sommes nombreux à en être toujours à ce stade-là… concernant la mort.
On voit un corps mort, et on pleure. Parce qu’il n’est plus là.
Comme un petit bébé à qui l’on aurait caché son doudou. Il croit qu’il n’existe plus et il pleure. Eh bien on a beau être soi-disant des adultes, on est très souvent semblable avec la mort. Semblable aux enfants qui croient qu’ils n’existent plus s’ils se cachent derrière leurs mains.
C’est tout aussi stupide, devant un corps mort, de penser que la personne n’existe plus!
C’est stupide mais c’est très humain, nous sommes fabriqués ainsi. On voit quelque chose de fini, un corps, alors on pense que TOUT est fini. On voit un corps mort, et on pense que TOUTE LA PERSONNE n’est plus là, du coup.
Mais… Chers Amis, une personne ce n’est pas seulement un corps. Nous le savons bien grâce aux philosophes : c’est un corps PLUS une âme.
Ce n’est pas parce que les yeux du petit enfant sont cachés qu’il est lui-même caché. Ce n’est pas parce qu’un corps est mort que l’âme n’existe plus. Logique, n’est-ce pas ?
Et c’est notre foi chrétienne, ça, chers Amis. Il ne faut pas l’oublier.
Par conséquent, ce que nous célébrons en ce 2 novembre, la commémoration des fidèles défunts, ce n’est pas du tout quelque chose de TRISTE. C’est au contraire l’occasion de nous rappeler que, si nous sommes adultes dans notre Foi, nous croyons que nos défunts continuent de vivre, de l’autre côté de ce mystérieux passage que l’on appelle la mort.
Et non seulement leur âme vit, mais ils ressusciteront corps et âme le moment venu, retrouvant ainsi – même ! – des facultés qui étaient peut-être infirmes ou malades ici-bas.
Quelle joie de penser qu’un jour, à la résurrection des morts, un aveugle décédé verra Dieu de ses propres yeux. Quelle joie de penser qu’une personne en fauteuil roulant ici-bas se tiendra ce jour-là debout devant son Dieu !
C’est exactement ce que nous disait la première lecture que j’ai choisie pour vous ce soir, le livre de Job : « Je sais, moi, que mon libérateur est vivant ! Et je sais qu’à la fin, avec mon corps, je me tiendrai debout, et de mes yeux de chair je verrai Dieu ! »
C’est pourtant un passage de l’Ancien Testament, des siècles avant Jésus ! Et c’est un passage qui nous parle de ce qui nous attend, de la résurrection des morts.
Nous sommes des pèlerins, ici-bas, Chers Amis. Des passagers dans un véhicule qu’on appelle le corps. Mais ce n’est pas notre lieu définitif de vie, quoi qu’on puisse en penser.
C’est un corps, oui, qui nous attend à la résurrection des morts, mais un corps glorieux. C’est-à-dire guéri. Et comme ce n’est pas notre but ultime, notre corps d’ici-bas, mais juste quelque chose de provisoire, eh bien forcément le corps que nous avons ici-bas n’est pas glorieux, pas bien glorieux…
…il n’y a pas de mannequin, ici, parmi vous, non ?
Non, on n’est personne à avoir un corps exceptionnel, hein ! C’est un truc provisoire qui n’est pas appelé à durer. D’ailleurs nous le savons bien, ça vieillit, un corps.
Vous connaissez les meubles IKEA, Chers Amis ? Les meubles IKEA – pardon si vous en avez, j’en ai moi aussi – ce n’est pas forcément ce qui va vous durer toute la vie, c’est pas fait pour ça.
Même que des fois, quand on en achète, il y a une pièce en trop dont on ne sait pas trop quoi faire, ou alors il en manque une ! Ce sont des meubles bien pratiques, pas chers, mais ce n’est pas du Louis XVI, on est d’accord…
Notre corps, c’est ça. C’est un meuble IKEA pour ici-bas, pour un temps. Alors on s’adapte comme on peut mais ça vieillit… et puis ça vieillit mal, Ça se casse, ça tombe malade parfois. Et il arrive même que, dès le début de notre corps, il manque une pièce, on appelle cela le handicap. Ou qu’il y ait une pièce en trop, un chromosome en trop par exemple.
Parce qu’on n’est pas faits pour vivre dans ce corps provisoire, Chers Amis.
On n’est pas faits pour vivre éternellement là-dedans, heureusement !
Nous sommes CITOYENS DES CIEUX, c’est la deuxième lecture, Paul, qui nous le rappelait. Nous sommes Citoyens des Cieux, c’est magnifique comme titre !
Ici, c’est du provisoire, simplement. Mais là-haut, c’est autre chose ! Ici, rien n’est simple, rien n’est facile. Il y a des handicaps qui sont de sacrés fardeaux. Mais dans l’Evangile, Jésus nous disait qu’après le fardeau, il nous offrira le repos.
Notre but est bien plus loin, bien plus haut, bien plus beau, bien plus grand que ce que nous vivons ici-bas. Nous sommes Citoyens des Cieux, c’est quand même pas rien ! Nous avons un passeport à étoiles… mais ce n’est pas celui de la communauté européenne, ce sont les étoiles des cieux qui sont sur notre passeport à nous, ce n’est pas rien !
Alors ça ne veut pas dire, évidemment, qu’il faut chercher la mort, qu’il faut se suicider !
Bah non, ça reviendrait à jeter par la fenêtre des meubles IKEA alors qu’ils peuvent encore servir, ce serait dommage ! Bien sûr qu’on aimerait bien vivre dans du Louis XVI un peu plus vite que prévu mais… il faut se contenter de ce que l’on a ici-bas.
On goûte d’ailleurs aussi aux joies de ce monde, pas seulement à ce qui est difficile dans nos vies. Quand on y réfléchit, on a des joies aussi, bien sûr. Alors patience ! Tout est affaire de temps. La mort aussi, d’ailleurs.
Chers Amis, ne nous cachons pas la beauté de tout cela comme les petits enfants se cachent le visage derrière leurs mains !
Ne soyons pas tristes pour nos défunts, pour toutes ces petites lumières qui brillent, ici, devant vous et qui symbolisent leur âme qui est vivante. Ils vivent ! Ils brillent éternellement au ciel et un jour, avec eux, nous aurons un corps glorieux à la résurrection des morts.
Ils sont toujours avec nous. Ils nous regardent avec tendresse évoluer dans notre corps IKEA…
Et si vous écoutez bien, vous les entendrez peut-être murmurer… « Patience… patience… un jour, vous aussi, tous ensemble, avec nous, vous aurez un fauteuil Louis XVI. Mais d’ici-là, patience !… Et puis rassure-toi, nous disent-ils aussi quand on les écoute bien, rassure-toi, je vais bien… si tu savais comme c’est beau là-haut… Et puis surtout n’oublie pas d’aimer, nous disent-ils également… on n’emporte rien d’autre que l’Amour qu’on a répandu autour de nous. Alors profite de la vie, nous disent-ils, répands l’Amour autour de toi… et surtout prends patience… Un jour tu comprendras… »
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Clarens, samedi 2 novembre 2024, 18.00
Et dans une version un peu différente jadis :
Nyon, dimanche 2 novembre 2014, 19.00
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