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Homélie pour le 4e dimanche de Carême, C
Josué 5,10-12 / Psaume 33 / 2Corinthiens 5,17-21 / Luc 15, 1-3.11-32
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais c’est assez humain, il suffit qu’on entende « Un homme avait deux fils » pour que l’ordinateur central s’enclenche et qu’aussitôt, on se dise : « Ah oui, le fils prodigue, on connaît… La conclusion c’est que, comme le père de cette histoire, Dieu nous aime. »
Dieu nous aime… ça fait un peu slogan de mai 68, ça fleure bon les hippies, les petites fleurs bleues… Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, Dieu nous aime.
Bon, c’est important de le redire, que Dieu nous aime, hein ! Parce que… il y a encore quelques décennies c’était pas tout à fait ce qu’on prêchait dans l’Eglise, parfois…
Mais enfin, dit comme ça, ça fait un peu « fleur bleue ».
Alors si on voit Dieu comme ça, il faut très-très vite arrêter de fumer la moquette, hein… Parce que Dieu nous aime, oui, mais pas à la mode « hippie », sûrement pas…
Dieu ne nous aime pas comme des êtres d’un monde idéal qui vivraient en paix au milieu des champs fleuris de petites fleurs, genre Woodstock, voyez.
…D’ailleurs au bout de trois jours à Woodstock, il y avait plutôt de la boue que des petites fleurs, entre nous soit dit.
Dieu ne nous aime pas niaisement, deux doigts en l’air avec un joint à la bouche. Non !
Dieu nous aime violemment. Ça peut sembler étrange de le dire comme ça… Passionnément. Fougueusement. Il y a de l’éros en Dieu, de l’érotisme dans sa manière de nous aimer… c’est pas moi qui le dis, hein, c’est Benoît XVI qui l’a écrit. Pas François, hein, Benoît XVI : il y a de l’éros en Dieu. Ça a été le premier pape à le dire.
Dieu nous aime avec fougue. Comme le plus merveilleux des amoureux.
Et exactement comme un ami, vous le savez bien, c’est celui qui connaît le plus sombre de nous-mêmes et qui nous aime quand même, eh Dieu nous aime infiniment… non pas sans nos péchés mais au cœur de notre péché ! C’est là, précisément, dans la plus sombre de nos ombres, qu’il nous aime.
Il nous aime dans notre imperfection. Avec nos petits bobos quotidiens autant qu’avec nos plus grandes fautes.
Alors attention, je ne suis pas en train de vous signer un chèque en blanc de la part de Dieu : c’est pas parce qu’il nous aime au cœur de notre péché que c’est une raison de péché, non, bien sûr. Mais il nous aime au cœur de nos erreurs, au cœur de nos égarements.
Et ce qui le transporte d’allégresse, c’est lorsque nous avons compris tout cela et que nous revenons vers lui. Par exemple en demandant le beau sacrement de réconciliation.
Exactement comme le fils de la parabole revient vers son père en prévoyant de lui demander pardon. Ça a pas dû être facile, hein, pour lui… ça a pas dû être facile.
Et pour nous non plus ce n’est pas facile.
Mais c’est pas facile en grande partie à cause de nos préjugés à nous. Parce qu’on s’attend à trouver en face de nous un juge qui nous gronderait pour ce que nous avons fait. Un prêtre qui nous dirait : « C’est pas bien ! »
Et du coup, on se prépare à dire qu’on n’est pas bien fier, qu’on n’est pas bien digne… Exactement comme le fils se prépare à dire : « Je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes serviteurs ! »
Mais c’est une fausse idée que nous avons, exactement comme le fils a une fausse idée de la réaction de son père… qui ne va pas du tout lui dire « c’est pas bien », mais « faisons la fête ! »
Et cette fausse idée que nous avons, elle est en partie alimentée, il faut bien le dire, par une Eglise qui a très-très-très mal compris pendant des siècles ce que devait être ce beau sacrement du pardon, de la réconciliation.
Il est grand temps de le dire : le confessionnal a trop souvent, trop longtemps été une chambre de torture et ça a fait fuir bien du monde. Alors que c’est l’inverse.
En réalité, si l’on continue de se baser sur la parabole qu’on vient d’entendre, que doit-il se passer au moment où l’on revient vers Dieu pour se réconcilier avec lui, avec en tête ce qu’on a prévu de lui dire : « je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes serviteurs… » ?
Eh bien vous l’avez entendu : le fils prévoit trois phrases : « Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi, je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes serviteurs », vous avez entendu.
Mais le père ne le laisse pas aller jusqu’au bout. Il a le temps de dire « Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi, je ne mérite plus d’être appelé ton fils… » et le père l’interrompt. Il ne le laisse pas dire « traite-moi comme l’un de tes serviteurs ». Il dit « faisons la fête, festoyons, tuons le veau gras ! »
Et voyez-vous, le pape François écrit parfois aux prêtres. Il y a des documents qu’il écrit à toute l’Eglise, mais il y a aussi des documents, des lettres, qu’il écrit aux prêtres, ou aux évêques.
Et dans un document, il y a trois ans, qu’il nous envoyait, il nous rappelait exactement cela : ne posez pas de questions impertinentes dans le sacrement du pardon. Au contraire. Ne laissez pas la personne aller jusqu’au bout de ses péchés. Interrompez-la. Dites-lui : Dieu connaît la suite, il faut se réjouir que tu reviennes vers lui, c’est ça le plus important, pas le reste.
Ah évidemment, ça change tout, hein ! ça change des prêtres de jadis qui nous regardaient d’un air soupçonneux, après qu’on ait péniblement égrainé les commandements et qui nous disaient : « Tu n’as rien d’autre sur le cœur ?… Tu n’as rien d’autre à me dire ?… Tu es sûr de n’avoir rien oublié ?… »
De quoi je me mêle ? C’est pas ça, l’attitude du père, dans l’Evangile ! C’est : « faisons la fête, tu es revenu vers Dieu. C’est ça qui compte ! »
C’est ça qui compte…
Alors heureusement vos prêtres d’aujourd’hui ont mieux compris cela, beaucoup mieux ! Dieu merci ! Et puis François, notre saint Père, nous aide en cela.
Il insiste aussi pour que nous accueillions l’autre frère, pas seulement celui qui revient, mais le fils aîné. Celui qui se fâche, celui qui dit : « C’est injuste ! Moi j’ai toujours fait comme il faut et jamais tu m’as donné de quoi faire la fête ! »
Il faut l’accueillir aussi, celui-là. Parce que nous l’avons aussi en nous, avouons-le ! ça nous arrive aussi d’avoir le regard mauvais parce qu’il a été pardonné à l’autre…
C’est une attitude tout aussi fausse et qui demande elle aussi d’être purifiée par l’amour de Dieu. Ce fils qui juge son frère trop durement, c’est nous, aussi.
Et cet autre fils qui est parti dilapider son bien et qui revient, persuadé de ne plus mériter l’amour de son père, c’est nous, aussi, très souvent.
Nous sommes dans les deux frères.
Or nous revenons vers Notre Père. Nous revenons vers lui à chaque messe, vous l’avez fait ce soir, certains que le fait même de revenir à lui, d’être conscient que nous ne sommes pas parfaits évidemment, eh bien cela suffit à son pardon infini.
On reçoit le pardon, au début de la messe, il faut le redire aussi, ça, hein ! Et il est valable ce pardon, sauf si l’on a commis des fautes graves qui regardent les commandements, mais pour le reste le pardon du début de la messe est important !
Après avoir célébré la Pâque dans le désert, nous l’avons lu dans la première lecture, les Hébreux ont pu manger les fruit de la terre. Mais avant, on a entendu que Dieu ne les a jamais abandonnés, ils avaient la manne. C’est le prophète Josué qui nous le rappelait.
Dieu ne nous abandonne JAMAIS. Quels que soient nos torts. Quelle que soit notre égarement, quels que soient nos déserts intérieurs ou extérieurs.
Et à fortiori au moment où on est persuadé qu’il nous a abandonnés. C’est là qu’il est le plus proche de nous.
Paul, dans la deuxième lecture, dans la seconde lettre aux Corinthiens, nous implorait, nous disait : « Laissez-vous réconcilier avec Dieu ! »
Laissez-vous réconcilier avec Dieu !…
Et il nous rappelait que nous ne sommes plus esclaves de nos fautes, le Christ nous a libérés de tout cela.
Le psaume, quant à lui, nous affirmait que celui qui ose se retourner vers Dieu, regarder à nouveau vers lui aura le visage qui resplendit, sans plus d’ombre ni trouble.
C’est ça, hein ! Quand on revient vers le Seigneur, on a le visage qui resplendit !
Alors oui, Dieu nous aime, chers Amis. Mais pas à la façon hippie. Dieu nous aime d’une force, mais d’une force… C’est du solide, son amour. C’est du roc, c’est du granit de nos montagnes.
Il nous aime comme nous sommes. Pas comme nous nous rêverions.
Et ça aussi, c’est une sacrée bonne nouvelle !
Alors mettons à profit ce temps du Carême pour revenir vers lui, d’une manière ou d’une autre. Pour vivre une réconciliation avec lui, d’une manière ou d’une autre.
Parce qu’il nous attend les bras ouverts pour faire la fête !
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Champex, samedi 26 mars 2022, 17.00
Lude Dominique
Merci c’est magnifique! J’aime que vous citiez notre pape émérite Benoît XVI! Et je jubile quand vous soulignez que les confessionnaux ne sont plus des chambres de torture! C’est tellement vrai que ce Sacrement de réconciliation nous met le cœur en fête! Confessionnal = salle de fête! Merci abbé Vincent: ils ont de la chance de vous avoir dans vos paroisses! Mais moi aussi, grâce à l’E-paroisse!
Vincent Lafargue
Je découvre votre commentaire au sortir d’une rencontre avec une personne qui a violemment critiqué mes prédications. On ne peut pas plaire à tout le monde… mais du coup votre message me touche à point nommé. Grand Merci à Vous !
Girod Jeanine
Monsieur Vincent….
c’est toujours avec intérêt et gratitude que je relis vos homélies. J’apprécie votre manière de nous ramener sur le bon chemin par des réflexions qui nous font réfléchir et souvent pleines d’humour 🙉
Pour ma part je regrette beaucoup que nous n’arrivions pas à recréer un modèle de paroissiens plus intéressés à se rencontrer. Le changement d’église et le COVID y sont pour quelque chose !!
J’espère cher Vincent, même si vous n’étiez pas de bonne humeur mardi dernier, ce que je comprends fort bien… vous n’oublierez pas
de prier pour nous afin que le Seigneur nous envoie son Esprit !
Merci pour tout, ne lâcher pas prise. St Vincent de Paul vous accompagne. 🙏
Bon week-end et à bientôt j’espère.
Vincent Lafargue
Merci Chère Jeanine ! Et encore désolé pour mardi.
Vincent