L’huile et la peur

Classé dans : Homélies, Méditer | 0
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Photo libre de droits : pixabay

Chers Amis,

L’Evangile que nous venons de réentendre peut nous choquer, surtout si nous le prenons au premier degré, comme une histoire réelle.

Vraiment ? Le maître de ces noces dit à ces pauvres cinq jeunes filles « je ne vous connais pas » ? alors qu’elles ont simplement manqué d’huile et qu’elles sont allées en chercher parce que les autres jeunes filles ne voulaient pas partager avec elles, en plus ? Mais c’est profondément injuste !

Je suis d’accord avec vous.

Sauf que… ce n’est pas un récit mais une parabole. Cela nous était dit dès la première phrase.

Il y a d’ailleurs un autre indice qui permet de se rendre compte immédiatement qu’il ne faut pas plaquer ces mots sur une éventuelle réalité : vous connaissez beaucoup de marchands qui vendent de l’huile pendant la nuit, vous ? Moi pas !

Voilà un indice, comme Jésus nous en donne en général dans les paraboles, pour nous dire : « Attention… je ne suis pas en train de te raconter une histoire réelle, je t’offre une parabole. » C’est-à-dire une jolie petite histoire qui raconte quelque chose mais qui veut nous apprendre autre chose, à travers les images qu’elle emploie.

Bon, alors ? Que faut-il comprendre de cette parabole ?

Eh bien je crois que, pour comprendre ce que Jésus essaie de nous dire, dans cet Evangile, il faut creuser un peu cette histoire des dix jeunes filles… et reprendre le texte en faisant très attention à ne pas lui faire dire ce qu’il ne dit pas mais à bien observer ce qu’il dit – et seulement ce qu’il dit.

Reprenons les éléments ensemble. Nous avons été choqués par l’attitude de l’époux qui n’a pas ouvert à ces cinq jeunes filles dites « insouciantes » qui n’avaient pas d’huile et qui sont allées en chercher. Bien.

Mais pourquoi n’étaient-elles pas présentes lorsque la porte des noces s’est ouverte ? Parce que c’est ça, leur réel problème : si elles avaient été devant la porte au moment où la porte s’est ouverte, avec les cinq autres jeunes filles, elles seraient rentrées.

Pourquoi n’étaient-elles pas présentes ?

…jouons, si vous le voulez bien, au jeu qu’adorent les enfants, au jeu des « pourquoi »… et remontons le cours des événements.

Pourquoi n’étaient-elles pas devant la porte ? Eh bien… parce qu’elles étaient chez les marchands en train d’aller chercher de l’huile !

Oui mais pourquoi sont-elles allées chercher de l’huile ? Eh bien parce qu’elles n’en avaient pas !

Oui mais pourquoi fallait-il de l’huile ? Eh bien pour leur lampes !

Oui mais pourquoi fallait-il des lampes ?…

Et là, il n’y a plus de réponse !

Parce que, Chers Amis, il n’est marqué nulle part, dans cet Evangile, qu’il faille des lampes ! Il n’est marqué nulle part dans cet Evangile qu’il faille de l’huile, nulle part.

Alors quel est le vrai problème ? Pourquoi n’étaient-elles pas devant la porte quand elle s’est ouverte ? Parce qu’elles ont eu PEUR de manquer de quelque chose dont, au final, elles n’avaient pas besoin.

Et ça, c’est fréquent dans nos vies, chers Amis. C’est fréquent qu’on se préoccupe de quelque chose dont on ne sait même pas si, au final, ce sera nécessaire ou utile… Mais on s’en préoccupe quand même, on est soucieux, on est bileux…

D’ailleurs le mot « préoccuper » dit bien l’absurdité de cette attitude : pré-occuper : s’occuper en avance. C’est absurde, hein ! Il faut s’occuper d’une chose quand elle arrive, pas en avance.

Prévoir, c’est intéressant : voir en avance. Être pré-voyant. C’est d’ailleurs comme cela qu’on appelle les cinq autres jeunes filles : les « prévoyantes ».

Au passage, elles ont raison de refuser de partager leur huile, même si ça peut nous choquer de prime abord. Si vous connaissez le fonctionnement d’une lampe à huile : si vous divisez l’huile en deux pour la partager à d’autres, ça va durer deux fois moins longtemps, et donc elles vont s’éteindre toutes les dix.

En revanche, les cinq autres jeunes filles auraient pu ne pas se préoccuper de quelque chose – dont elles n’avaient aucune preuve que c’était indispensable – mais avoir la sagesse. Celle dont parlait la première lecture, le livre de la Sagesse précisément, celle qui se laisse trouver par celui ou celle qui la demande.

Qu’est-ce qu’elles auraient fait par sagesse ? Eh bien elles auraient tout simplement proposé aux cinq jeunes filles de se mettre deux par deux, une qui a une lampe et une qui n’a pas d’huile… et tout allait bien !

Pour cela il faut un peu de sagesse. Malheureusement, elles en sont dénuées. Et donc, elles vont chez les marchands acheter l’huile dont elles ne savent même pas si elle est importante.

Sans sagesse, que se passe-t-il ? On se pré-occupe, on a peur de manquer. Il nous faut absolument aller chercher cet objet dont on ne sait absolument pas s’il sera nécessaire, mais la télévision a dit qu’il était tellement utile !

Vous voyez… c’est très actuel comme parabole.

La peur qui motive ce comportement est ce que Jésus essaie de nous faire abandonner.  Il passe son temps à nous dire : « N’ayez pas peur ! La peur est mauvaise conseillère, faites attention à la peur ! Et surtout n’ayez pas peur de Dieu ! »

On sait bien qu’on n’a pas à avoir peur de Dieu, il nous accueille tels que nous sommes, avec nos qualités, nos défauts.

D’ailleurs, je vous le signale au passage, les dix jeunes filles se sont endormies, par faiblesse.

Et pourtant il y en a cinq qui sont accueillies, ce qui prouve bien que Dieu nous accueille avec nos faiblesses humaines.

Par contre, il ne nous accueille pas si l’on a peur de lui. Et ça, ça devrait nous faire réfléchir.

Ça devrait nous inviter à nous débarrasser de l’image de cet ancien Dieu qui nous faisait peur, qui nous attendait au tournant. Parce que Dieu, le vrai, ne nous accueille pas avec nos peurs, justement pas. Il ne nous connaît pas quand on a peur de lui.

Et ne pas avoir peur c’est précisément ce que nous demandait Saint Paul dans la deuxième lecture, vous l’avez entendu au sujet de nos défunts notamment : n’ayez pas peur pour eux, disait-il. Plus exactement, il utilisait une très belle expression : « n’ayons pas peur pour ceux qui se sont endormis dans la mort ». C’est très beau. « Nous croyons, disait-il, que Dieu les emmènera, par Jésus, avec lui. »

C’est magnifique… nous croyons que Dieu les emmènera, par Jésus, avec lui.

Nous croyons, Chers Amis, que si nous n’avons pas peur, Dieu nous emmènera par Jésus avec lui. Il suffit de veiller, alors nous serons devant la porte, nous aussi, lorsqu’elle s’ouvrira. A condition de ne pas nous être préoccupés de choses futiles dont nous n’avons absolument pas besoin.

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Montreux, dimanche 12 novembre 2023, 11.00

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