Alors regarde… tu rêveras.

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Photo libre de droits : pixabay

Homélie pour le 29e dimanche TO, année C

Exode 17,8-13 / Psaume 120 / 2Timothée 3,14-4,2 / Luc 18, 1-8

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

Chers Amis,

Il y a quelques années, un certain Patrick Bruel chantait un véritable tube de l’époque qui disait ceci :

« Alors regarde, regarde un peu / je vais pas me taire parce que t’as mal aux yeux / alors regarde, regarde un peu / tu verras tout ce qu’on peut faire si on est deux… »

Eh bien le chanteur Bruel reprenait, sans le savoir, nos lectures d’aujourd’hui.

Paul, dans la lettre à Timothée, notre deuxième lecture, disait quelque chose d’assez semblable. C’est une lettre, la lettre à Timothée, où Paul donne des conseils aux personnes qui dirigent des communautés, qui enseignent à des communautés. Les prêtres, par exemple… Et Dieu sait si nous avons des conseils à recevoir, nous autres serviteurs bien imparfaits.

Paul rappelait qu’il nous faut proclamer l’Evangile à temps et à contre-temps. C’est à dire à la fois les pages agréables à entendre mais aussi les autres. Ne pas se taire même si ça fait mal aux oreilles ou aux yeux, en somme.

Et l’Evangile, vous savez, ce n’est pas une histoire de bisounours. Il y a des passages assez rudes, des pages qu’on prend en pleine figure. On est parfois bousculés par la Parole de Dieu. Et Jésus bousculait volontiers ses auditeurs…

Celui ou celle d’entre vous qui viendrait à l’église pour n’entendre des paroles doucereuses à chaque messe me ferait grand souci. Ce n’est pas cela la Parole de Dieu. Pas seulement cela, en tout cas.

Celui ou celle qui se vexe en s’étant senti bousculé un jour par telle ou telle parole de la Bible devrait peut-être réfléchir à sa manière de recevoir la parole de Dieu. Dieu ne nous dit pas que des choses agréables à entendre. Ce n’est pas toujours ce que l’on a envie d’entendre, la Parole de Dieu. Ce n’est pas de la guimauve, c’est une épée à deux tranchants, dit un psaume de la Bible.

On a l’image, hein ! Une épée à deux tranchants ce n’est pas un doudou en peluche. C’est une épée. A deux tranchants.

A fortiori, commenter la parole de Dieu… c’est une lourde tâche, pour nous autres prédicateurs. Et Paul nous demande, dans la deuxième lecture, de bousculer, de dénoncer le mal lorsque c’est nécessaire, de faire des reproches lorsqu’il le faut, et aussi d’encourager, le tout avec une très grande patience.

« Je vais pas me taire parce que t’as mal aux yeux » chantait Bruel… C’est un peu la tâche d’un prédicateur.

C’est d’ailleurs à cela qu’on reconnaît les vrais amis, vous le savez bien ! Les vrais amis, ce sont  ceux qui savent aussi nous dire ce qui ne va pas chez nous. Pas seulement ceux qui nous brossent dans le sens du poil, ça ce ne sont pas des amis… ce sont des « amis par beau temps » comme on dit.

Dans la chanson de Bruel, la deuxième partie du refrain disait « tu verras tout ce qu’on peut faire si on est deux… » Et c’est le but d’une communauté, d’être au moins deux. Puisque Jésus l’a dit : « Quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. » Et même quand on est neuf, comme ce soir, eh bien il est là. Et même si on était 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2… il serait là au milieu de nous, il nous l’a promis.

Une paroisse, ou une communauté, c’est aussi cela. Se mettre à deux au minimum pour faire les choses.

Une communauté dans laquelle chacun se dit que c’est à l’autre de s’engager parce que « moi, vous comprenez, j’en ai déjà bien assez fait pour la paroisse », cette communauté-là est en danger de mort, tout simplement. Et on en connait !

Seul, on ne peut rien faire. La communauté, le bien commun – c’est ça que ça veut dire, « communauté » ! – le bien commun, ça se construit forcément à plusieurs, en associant les forces, les efforts.

Regardez Moïse, dans notre première lecture, le livre de l’Exode. Il en a vécu, des choses, depuis le buisson ardent jusqu’aux tables de la Loi ! C’est un homme exceptionnel, Moïse ! Premier porte-parole de Dieu… Mais lorsqu’il s’agit de prier pour édifier la communauté, seul il en est incapable : il se lasse et ses bras baissent… Il a besoin de ses frères qui viennent soutenir ses bras, il a besoin d’une pierre pour s’asseoir un moment. Il a besoin des autres.

Nous sommes pareils, nous les prêtres. Nous prions pour vous, sans relâche, plusieurs fois par jour, avec persévérance, nous annonçons la bonne nouvelle à temps et à contre-temps, parfois avec douceur, parfois avec dureté, toujours avec patience comme nous le demande Paul, mais nous avons aussi besoin de vous pour nous soutenir !

Une communauté, ce n’est pas le prêtre qui parle et les fidèles qui viennent consommer. Ça, c’est un restaurant ou un supermarché ! Une communauté, c’est l’ensemble des personnes qui viennent prier, chanter, célébrer, louer le Seigneur… ensemble ! C’est ensemble que nous pouvons construire des communautés solides.

Alors on le sait bien, il n’y a de loin plus un prêtre pour chaque communauté. Et certaines sont en danger. Il y a des communautés qui vont vivre, parce qu’elles auront appris à s’associer, à se battre pour maintenir une vie. Une vie de communauté, une vie au village et dans la paroisse. Elles auront compris la phrase de Bruel : « tu verras tout ce qu’on peut faire si on est deux. » Au moins deux.

Et puis il y a des communautés qui vont mourir, à petit feu. Ce sont les villages, comme par hasard, qui n’avaient pas su non plus garder leur poste, leur épicerie, leur fanfare, leur vie associative. Ce sont les mêmes.

Parce que ces villages-là n’auront pas su s’associer.

Que chacun, alors, fasse comme le suggère la chanson de Bruel : « Regarde, regarde un peu… » Ouvre les yeux !

Que chacun de nous, chers Amis, quelle que soit notre communauté, que chacun de nous regarde sa communauté, sa paroisse. Que chacun ouvre les yeux sur ce qui manque, sur ce qui pourrait aller mieux. Il y a forcément des choses qui peuvent aller mieux.

Et que chacun se dise qu’il est responsable. Responsable de sa propre communauté. Chacun peut faire que les choses aillent mieux, chacun peut se demander où est sa place, maintenant, même après avoir déjà occupé plusieurs places dans plusieurs communautés.

L’Eglise est remplie de deux sortes de gens : les gens qui se demandent ce que l’Eglise peut faire pour eux… et les gens qui se demandent ce qu’ils peuvent faire pour l’Eglise. Parce qu’ils ont conscience que l’Eglise, c’est eux. C’est pas seulement les prêtres, les évêques, les papes. L’Eglise, c’est l’ensemble des Chrétiens.

Il y a bien des décennies en arrière, George Bernard Shaw disait : « Il y a les gens qui voient les choses telles qu’elles sont, et qui se demandent pourquoi. Et puis il y a ceux qui rêvent les choses telles qu’elles n’ont jamais été, et qui se demandent pourquoi pas… »

Alors tâchons de rêver nos communautés telles qu’elles n’ont jamais été… et de se demander : « Pourquoi pas ? »

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Les Diablerets, samedi 15 octobre 2022, 18.00

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